agriculture et arboriculture en Algérie avant 1962
LE JARDIN DE LA FRANCE

LE JARDIN DE LA FRANCE

Au temps où, chargées de céréales, les lourdes galères romaines fendaient les flots méditerranéens, amenant vers les terres glorieuses du Latium les produits de la blonde Cérès, la fertilité d'un sol généreux, l'abondance de ses fruits précocement mûris aux rayons caressants d'un soleil clément, la richesse des ressources agricoles et une certaine impression d'intarissable fécondité, tout cela concourait à justifier dans l'esprit des populations latines le renom de Grenier de l'Empire dont jouissait à cette époque l'Afrique du Nord.

Ce renom, elle ne l'a pas perdu. Il convient même de dire que la colonisation française lui a donné un nouvel éclat. Derrière les armées conquérantes qui refoulaient les masses barbares dont le pillage et l'incurie avaient compromis la richesse de cette terre merveilleuse, nos colons rappelèrent l'ancienne prospérité. Ils firent même plus. Autour de l'antique grenier, ils réservèrent de vastes espaces à des cultures plus délicates et plus choisies. Aussi est-il encore plus juste, lorsque l'on considère à côté de ces principales exportations, telles que le vin, le blé et les moutons, les produits de moindre importance qu'elle envoie à la métropole, d'appeler l'Algérie le Jardin de la France.

Là poussent à l'envi, dans des terrains propices, pommes de terre, artichauts, haricots verts, tomates, petits pois et un grand nombre d'autres légumes qui, pour être moins nécessaires à l'alimentation générale, n'en sont pas moins appréciables.

Afrique du nord illustrée du 3-12-1921 - Transmis par Francis Rambert
mai 2021

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LE JARDIN DE LA FRANCE

LE JARDIN DE LA FRANCE

Au temps où, chargées de céréales, les lourdes galères romaines fendaient les flots méditerranéens, amenant vers les terres glorieuses du Latium les produits de la blonde Cérès, la fertilité d'un sol généreux, l'abondance de ses fruits précocement mûris aux rayons caressants d'un soleil clément, la richesse des ressources agricoles et une certaine impression d'intarissable fécondité, tout cela concourait à justifier dans l'esprit des populations latines le renom de Grenier de l'Empire dont jouissait à cette époque l'Afrique du Nord.

Ce renom, elle ne l'a pas perdu. Il convient même de dire que la colonisation française lui a donné un nouvel éclat. Derrière les armées conquérantes qui refoulaient les masses barbares dont le pillage et l'incurie avaient compromis la richesse de cette terre merveilleuse, nos colons rappelèrent l'ancienne prospérité. Ils firent même plus. Autour de l'antique grenier, ils réservèrent de vastes espaces à des cultures plus délicates et plus choisies. Aussi est-il encore plus juste, lorsque l'on considère à côté de ces principales exportations, telles que le vin, le blé et les moutons, les produits de moindre importance qu'elle envoie à la métropole, d'appeler l'Algérie le Jardin de la France.

Là poussent à l'envi, dans des terrains propices, pommes de terre, artichauts, haricots verts, tomates, petits pois et un grand nombre d'autres légumes qui, pour être moins nécessaires à l'alimentation générale, n'en sont pas moins appréciables.

Et, en marge des cultures maraîchères, objets de soins diligents, poussent librement les citronniers, les orangers et les mandariniers, que ceignent de vastes étendues de vigne ou des allées de figuiers opaques, dont les fruits violets semblent des lambeaux d'ombre de la nuit dernière emprisonnés par le feuillage.
Ainsi Demeter féconde prodigue à ses enfants les produits essentiels des repas, leur agrément et leur parure.

C'est surtout sur les bords tempérés de la mer ou dans les plaines profondes, que protègent les reliefs montagneux du Sahel, que poussent les légumes.
La douceur et la régularité du climat, l'absence presque complète de gelées, la constitution géologique du sol formé d'alluvions légères et de date récente d'ingénieux systèmes d'irrigations régulières suppléant aux problématiques chutes de pluie, les conduisent à une maturité précoce.

Or, de plus en plus, les primeurs sont réclamés pour les besoins des pays tempérés. La cuisine française s'en montre très friande. Ne tire-t-elle pas d'eux son renom mondial auquel les fêtes organisées par le Touring-Club de France vont redonner un nouveau lustre ?

L'importance économique des primeurs dépendant étroitement des moyens de transport, n'a cessé de s'accroître à mesure que s'affirmait le perfectionnement de ceux-ci.

Aussi, toutes les régions d'Alger, d'Oran et de Philippeville leur doivent-elles en partie leur activité et leur prospérité.

La proximité des ports leur facilite le recrutement de la main-d'œuvre nécessaire pour leur culture et pour l'expédition.

Le commerce des primeurs se range donc en bonne place parmi les nombreuses ressources de l'Algérie. On peut d'ailleurs en juger par l'exposé du chiffre des exportations que nous choisirons à dessein dans les années normales d'avant-guerre, afin de leur garder leur réelle importance.

Les statistiques officielles que nous donne la Situation générale de l'Algérie accusent qu'au cours des années 1911, 1912 et 1913 on a exporté une moyenne de
253.459 quintaux de pommes de terre,
76.900 - d'artichauts,
60.370 - de haricots verts,
64.491 - de tomates,
25.538 - de petits pois.

La guerre a fortement contrarié la culture de ces primeurs. Aussi constate-t-on, durant les années de 1914 à 1918, un profond fléchissement.
C'est à partir de 1919 seulement que se manifeste la reprise.

Au cours de 1920, le commerce d'exportation des fruits et des primeurs a été en progression sensible sur celui de l'année précédente.

"Ce mouvement d'exportation, nous dit l'exposé de la Situation générale, n'a pas suivi, cependant, une courbe ascendante aussi élevée que celle qu'on aurait pu espérer. Cela tient sans doute au déficit des récoltes par suite de la sécheresse et aussi aux cours plus élevés pratiqués sur les marchés de la Colonie qui ont retenu dans le pays même la plus grande partie de ses produits. Aussi les quantités de primeurs, exportées demeurent-elles inférieures à celles qui étaient expédiées avant la guerre. "

On constate cependant un relèvement encourageant sur les chiffres de 1919.

C'est ainsi que nous voyons l'exportation des pommes de terre passer de 78.709 quintaux à 128.539. Celle des artichauts, de 21.359 quintaux à 26.950. Celle des tomates de 16.903 quintaux à 20.854. Seules celle des petits pois et des haricots verts a fléchi, la première de 11.900 quintaux à 10.697, la seconde de 5.156 à 4.519 quintaux.

Mais l'Algérie n'est pas seulement un jardin, elle est aussi un verger dont les fruits sont recherchés par les gourmets et pour la confiserie.

Ce qui fait le charme de certains paysages algériens qu'apprécient particulièrement les touristes, à cause de la poésie qui émane de cet arbre élégant, aux formes arrondies, au parfum pénétrant, c'est l'oranger. Importé par les Arabes dans le bassin méditerranéen, originaire de Chine, l'oranger a trouvé sur le littoral africain des sites qui lui conviennent admirablement. Les indigènes, qui ne savaient pas établir des abris artificiels, n'ont planté des orangers que dans des endroits particulièrement protégés contre les grands vents, nuisibles, comme on le sait, à la floraison. C'est surtout dans les gorges et à la base des montagnes qu'ils avaient établi de nombreuses plantations. Nous les avons étendues. Nous pourrions même les étendre encore davantage et transformer l'Afrique du Nord en un véritable jardin des Hespérides. Déjà les orangeries de Blida sont célèbres dans le monde entier, et le grand poète Lamartine lui-même aimait, sur ses vieux jours, attristés par la misère, à se délecter de la saveur des beaux fruits d'or qu'on lui expédiait d'une orangerie réputée, aujourd'hui envahie par des constructions, l'orangerie du Tapis-Vert.

Quant à la mandarine, elle est d'introduction récente. Au commencement du XIXème siècle elle était une curiosité dans les jardins botaniques italiens. Ce n'est que depuis 1850 que sa culture s'est étendue. Or, depuis quelques années, le marché lui est particulièrement favorable. L'Algérie en détient presque le monopole d'exportation pour la France. Les citrons, les cédrats n'ont, à ce point de vue, qu'une importance secondaire.

Au cours de l'année 1920, les chiffres d'exportation se sont sensiblement relevés. De 34.954 quintaux en 1919, ils ont passé à 36.590 pour les oranges et les citrons. De 89.630 quintaux pour les mandarines en 1919, ils sont montés à 93.581 quintaux l'année suivante.

On voit donc par ce simple exposé l'importance, du commerce des primeurs en Algérie. Nul doute que l'intensification des cultures, les progrès de l'irrigation, les perfectionnements apportés à l'expédition et surtout la construction de bateaux spécialement aménagés pour ces sortes de transports, ne contribuent un jour à accroître le chiffre des exportations, et alors, par delà l'étendue azurée de la mer, l'Algérie apparaîtra ce jour-là à la France comme le pays des fruits d'or et des roses vermeilles.