agriculture et arboriculture en Algérie avant 1962
VENDANGES ALGERIENNES

VENDANGES ALGERIENNES

Au moment où toute la Gascogne célèbre Bacchus Triomphant, alors que la France entière retentit de l'écho des fêtes somptueuses qui, à Bordeaux, viennent de commémorer l'apothéose du Jus de la Treille, cher au poète algérien Pierre Batail. il nous a paru, intéressant de consacrer quelques pages aux vendanges algériennes. La vigne n'est elle pas, depuis un demi-siècle, et en dépit des crises passagères et des mauvaises années, la grande richesse, le but vers lequel tendent les espérances de la majeure partie des colons de l'Afrique du Nord ? Et devions-nous attendre ici que le Midi ou l'Ouest de la France nous aient donné l'exemple d'une fête qui, depuis longtemps déjà, eût dû être célébrée ici avec plus de faste et d'apparat que dans toute autre contrée ? Enfin - et disons-le tout doucement, pour que la chose ne soit pas répétée - combien sont-ils nombreux, aujourd'hui, les grands crus de Guyenne, de Bourgogne, de Provence et d'ailleurs, aux bouteilles caparaçonnées de somptueuses étiquettes : les bouteilles de château A, B ou Z, enrubannées de poussière grise et de toiles d'araignées et portées avec un respect dévotieux par les sommeliers des grands restaurants à la mode ; combien parmi virent plus modestement le jour sur les coteaux du Sahel, à Rouïba, Maison-Blanche, l'Arba, Sidi-Moussa, ou, plus loin encore, à Médéa, Miliana, Cherchell, Mascara, partout enfin où, du cap Bon à Port-Say, la vigne, ici, couvre les espaces et étend à l'infini l'immense tache verte qui repose l'œil de l'aridité de la plaine africaine.

Et, une fois encore, en l'an de grâce 1909, Bacchus, ici, a été triomphant, mais discrètement triomphant, sans bruit, sans réclame tapageuse, fort de sa puissance et encore si timide qu'il nous a fallu accomplir des prodiges d'adresse et de patience pour fixer par l'objectif et vulgariser par l'image les péripéties d'une campagne de vendanges dans une grande exploitation algérienne.

Afrique du nord illustrée du 2-10-1909 - Transmis par Francis Rambert
mai 2021

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VENDANGES ALGERIENNES
VENDANGES ALGERIENNES
VENDANGES ALGERIENNES

Au moment où toute la Gascogne célèbre Bacchus Triomphant, alors que la France entière retentit de l'écho des fêtes somptueuses qui, à Bordeaux, viennent de commémorer l'apothéose du Jus de la Treille, cher au poète algérien Pierre Batail. il nous a paru, intéressant de consacrer quelques pages aux vendanges algériennes. La vigne n'est elle pas, depuis un demi-siècle, et en dépit des crises passagères et des mauvaises années, la grande richesse, le but vers lequel tendent les espérances de la majeure partie des colons de l'Afrique du Nord ? Et devions-nous attendre ici que le Midi ou l'Ouest de la France nous aient donné l'exemple d'une fête qui, depuis longtemps déjà, eût dû être célébrée ici avec plus de faste et d'apparat que dans toute autre contrée ? Enfin - et disons-le tout doucement, pour que la chose ne soit pas répétée - combien sont-ils nombreux, aujourd'hui, les grands crus de Guyenne, de Bourgogne, de Provence et d'ailleurs, aux bouteilles caparaçonnées de somptueuses étiquettes : les bouteilles de château A, B ou Z, enrubannées de poussière grise et de toiles d'araignées et portées avec un respect dévotieux par les sommeliers des grands restaurants à la mode ; combien parmi virent plus modestement le jour sur les coteaux du Sahel, à Rouïba, Maison-Blanche, l'Arba, Sidi-Moussa, ou, plus loin encore, à Médéa, Miliana, Cherchell, Mascara, partout enfin où, du cap Bon à Port-Say, la vigne, ici, couvre les espaces et étend à l'infini l'immense tache verte qui repose l'œil de l'aridité de la plaine africaine.

Et, une fois encore, en l'an de grâce 1909, Bacchus, ici, a été triomphant, mais discrètement triomphant, sans bruit, sans réclame tapageuse, fort de sa puissance et encore si timide qu'il nous a fallu accomplir des prodiges d'adresse et de patience pour fixer par l'objectif et vulgariser par l'image les péripéties d'une campagne de vendanges dans une grande exploitation algérienne.

C'est au domaine de Guellabou, entre l'Arba et Sidi-Moussa, créé voici bientôt 30 ans par M. Pélegri, un des plus vieux colons algériens, que nous avons eu, ces jours derniers, la bonne fortune d'assister à quelques journées de vendanges.

La ferme, située au centre du domaine, s'étend sur une superficie de neuf cents hectares, dont quatre cent quarante complantés en vigne. La maison du maître est entourée de dix bâtiments servant à loger les ouvriers et leurs familles.

Les vendanges ont, cette année, duré tout un mois, pendant lequel environ sept cents ouvriers, tant indigènes qu'européens, ont été employés à la cueillette du raisin et à la vinification. Le personnel stable, celui qu'on emploie pendant toute l'année, comprend environ 250 personnes.

L'exploitation, créée il y a 30 ans, agrandie, perfectionnée, pourvue chaque jour de l'outillage le plus récent, s'est aujourd'hui complètement modernisée, et tout, dans l'important domaine de Guellabou, fonctionne, ainsi qu'on pourra s'en rendre compte en examinant nos illustrations, par l'électricité.

En effet, tous les bâtiments, extérieurement et intérieurement, sont éclairés à l'électricité.

Toute la machinerie de la cave : monte-charges, fouloirs-égrappoirs, pompes électriques, etc., est actionnée par des moteurs qui reçoivent le courant de génératrices de 15 à 45 chevaux, actionnées elles-mêmes par une machine Compound, système Weyher et Richemond, de la force de 72 chevaux effectifs.
Le matériel de vinification correspond aux besoins d'une grande exploitation moderne et pourvue des aménagements les plus perfectionnés. La cuverie contient 45 cuves d'une contenance de 240 hectos : les cuves servent à la fermentation du moût. La cave renferme 177 amphores de plusieurs dimensions, variant de 130 à 170 hectos. 70.000 hectolitres de vin peuvent être logés dans ces amphores

Nous n'entrerons pas ici dans le détail des vendanges, qui, au domaine de Guellabou, sont une véritable fête. Les clichés que nous publions ci-contre, et notamment celui que nous consacrons au char de Bacchus, diront suffisamment au lecteur l'importance qu'attachent à cette cérémonie annuelle les collaborateurs de M. Pélegri.

Nous sommes heureux d'avoir pu mettre sous les yeux de nos lecteurs, agriculteurs ou citadins, ces notes illustrées qui, pour les uns et les autres, seront un précieux encouragement et une leçon de choses dont tous voudront tirer profit.

Ajoutons ici quelques renseignements sur le domaine de Guellabou et son sympathique propriétaire, M. Pélegri, qui l'a fondé voici trente ans.
M. Michel Pélegri, aujourd'hui maire de Sidi-Moussa et président du Conseil d'administration du Comptoir d'Escompte de l'Arba, est aidé dans sa tâche par ses fils, en qui il a trouvé des collaborateurs d'une compétence à toute épreuve.

Indépendamment des 440 hectares plantés de vignes, le domaine de Guellabou comprend 6 hectares d'orangeries, 12 environ de plantations de caroubiers, des oliviers, et le surplus du terrain (de 3 à 400 hectares), en céréales et plantes maraîchères.

La maison de maître fait face à un grand jardin d'agrément qui la sépare de la route de l'Arba à Sidi-Moussa.

La propriété est traversée par la route de l'Arba à Sidi-Moussa sur une longueur de 5 kilomètres.

Le personnel du domaine s'adonne également à l'élevage, et nos lecteurs ont pu remarquer que le char de Bacchus, dont nous donnons une reproduction photographique sur la couverture de notre numéro de ce jour, est attelé de 2 zébus mâles, importés de l'Inde il y a quelques années, et dont le croisement avec des bovins algériens a déjà donné de magnifiques produits.