Alger, l'Amirauté
L'explosion de la poudrière de l'Amirauté
Afrique illustrée du 9-3-1935 - Transmis par Francis Rambert

L'explosion de la poudrière de l'Amirauté

C'était le huit mars 1 845. Dix heures et quart du soir. La foule des noctambules se pressait dans la rue de la Marine sur la place Royale, se prolongeant jusqu'aux rues Bab-Azoun et Bab-el-Oued, profitant de cette fin de journée si douce à la veille du printemps.

Soudain une formidable explosion retentit du côté de l'Amirauté, suivie par une série d'autres non moins fortes, qui semblaient autant de bordées lâchées par quelque navire... Une terreur panique saisit d'abord les Algérois, interdits par ce phénomène inconnu. Puis la foule en masse se précipite vers le port, vers tous les points d'où elle pense pouvoir se rendre compte de ce qui s'est produit.

Dans la nuit sans lune, c'est le grand noir, et le phare de l'Amirauté lui-même ne brille plus. On descend à la Marine et un spectacle affreux attend les arrivants. Des blessés hurlant de douleur, des gens courant dans les ténèbres, s'offrent d'abord à la vue. Puis un énorme monceau de décombres, des maisons en ruines... Bientôt le doute n'est plus permis : c'est la poudrière de la Marine qui a sauté !

On avait cru tout d'abord, à constater que le phare était éteint que celui-ci avait fait explosion... " Conjecture, écrit " l'Akhbar " du 9 mars, qui n'était pas fort éloignée de la vérité. Les premiers qui arrivèrent à la Marine eurent en dépassant le bâtiment de l'Amirauté un spectacle de ruine et de désolation difficile à décrire. Une partie du rempart casemate situé entre la vieille tour espagnole connue sous le nom de Penon, et le port, les maisons adossées à ce rempart n'étaient plus qu'un monceau de décombres d'où s'échappaient des malheureux plus ou moins mutilés couverts de sang et de poussière.

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1.-
Alger,quelques catastrophes- Faits divers
2.- les feuillets d'El-Djezaïr- Henri Klein - L'ensemble militaire - Forts et Batteries - Batteries de l'Amirauté


sur site : juin 2021

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L'explosion de la poudrière de l'Amirauté
L'explosion de la poudrière de l'Amirauté

C'était le huit mars 1 845. Dix heures et quart du soir. La foule des noctambules se pressait dans la rue de la Marine sur la place Royale, se prolongeant jusqu'aux rues Bab-Azoun et Bab-el-Oued, profitant de cette fin de journée si douce à la veille du printemps.

Soudain une formidable explosion retentit du côté de l'Amirauté, suivie par une série d'autres non moins fortes, qui semblaient autant de bordées lâchées par quelque navire... Une terreur panique saisit d'abord les Algérois, interdits par ce phénomène inconnu. Puis la foule en masse se précipite vers le port, vers tous les points d'où elle pense pouvoir se rendre compte de ce qui s'est produit.

Dans la nuit sans lune, c'est le grand noir, et le phare de l'Amirauté lui-même ne brille plus. On descend à la Marine et un spectacle affreux attend les arrivants. Des blessés hurlant de douleur, des gens courant dans les ténèbres, s'offrent d'abord à la vue. Puis un énorme monceau de décombres, des maisons en ruines... Bientôt le doute n'est plus permis : c'est la poudrière de la Marine qui a sauté !

On avait cru tout d'abord, à constater que le phare était éteint que celui-ci avait fait explosion... " Conjecture, écrit " l'Akhbar " du 9 mars, qui n'était pas fort éloignée de la vérité. Les premiers qui arrivèrent à la Marine eurent en dépassant le bâtiment de l'Amirauté un spectacle de ruine et de désolation difficile à décrire. Une partie du rempart casemate situé entre la vieille tour espagnole connue sous le nom de Penon, et le port, les maisons adossées à ce rempart n'étaient plus qu'un monceau de décombres d'où s'échappaient des malheureux plus ou moins mutilés couverts de sang et de poussière.

Le pavillon habité par le commandant Pallard, sous-directeur de l'artillerie avait été emporté ainsi que les logements habités par des compagnies d'ouvriers artilleurs et de pontonniers. Le logement du Commissaire de la Marine était abattu et il n'en restait plus qu'un pan de mur, la maison du Directeur du Port avait éprouvé le même sort à l'exception d'une pièce restée à peu près intacte... "

Aussitôt les secours s'organisent malgré les difficultés de l'obscurité. L'amiral commandant la Marine, alerté fait débarquer les équipages des bâtiments de guerre tandis que les troupes de la garnison accourent sur lés lieux du sinistre.

" Les explosions, cause de ces désastres, avaient eu lieu dans deux magasins séparés l'un de l'autre par le fossé qui règne autour de la vieille tour espagnole sur laquelle se trouve le phare. Le feu allumé dans l'un, pour une cause encore inconnue se sera communiqué à l'autre ", ajoute le journal local.
L'événement était d'autant plus imprévisible que depuis deux semaines nul n'avait pénétré dans les magasins et que ceux-ci, en outre, étaient gardés par de doubles portes.

L'inventaire qu'on possédait montrait qu'ils ne contenaient qu'une petite quantité de poudre et des grenades dont la fabrication remontait avant la conquête. Il y avait aussi des boites à balles, des biscaïens et des obus, tous ces projectiles appartenaient à la Marine.

On se perdait donc en hypothèses quant à la cause du sinistre, cependant que les bruits les plus divers se faisaient jour dans la ville. On voulait y voir un attentat et la nouvelle fut colportée qu'on avait trouvé le corps d'un maure, d'aucuns disaient d'un nègre, parmi les décombres et que ce devait être l'auteur de la catastrophe, payant de sa vie ce crime dû au fanatisme.

Quoiqu'il en soit les effets terrifiants de l'explosion, eu égard au peu de matières inflammables contenues dans les réduits ne s'expliquait pas. On en vint à penser que quelque dépôt ignoré de poudre et de munitions remontant avant notre occupation pouvait bien avoir existé et expliquerait la violence de cette catastrophe. Avant que la lumière ne fut faite, si elle devait l'être quelque jour, on se félicitait de ce que le parc d'artillerie qui était proche n'eut pas été atteint, car il renfermait six prolonges chargées de trente barils de poudre et de trente caisses de cartouches...

" Outre les ravages dont nous venons de parler, écrit encore " l'Akhbar ", plusieurs accidents de moindre importance ont eu lieu. D'énormes pierres lancées à près de deux cents mètres et retombant d'une hauteur considérable ont causé quelques avaries dans le port, notamment sur le " Bouberak ". On a trouvé de ces blocs sur les terrasses de l'Amirauté ; un obus a fait une large brèche dans la chambre de l'aide de camp de l'Amiral et y a éclaté, les vitres se sont brisées partout dans la rue de la Marine et sur plusieurs autres points ".

Le nombre des victimes était, on le pense considérable. Les Services de l'Artillerie comptaient 88 morts et 11 blessés. Le lendemain à l'appel il manquait 135 militaires, dont 48 blessés. Au nombre des morts figurait le chef d'escadrons d'artillerie Pallard.. On disait qu'il n'avait accepté qu'avec beaucoup de répugnance cette place de sous-directeur de l'Artillerie, et qu'il avait hésité pendant un mois à venir s'installer dans le logement ou il devait trouver la mort ; enfin par une étrange fatalité, il avait été le soir même au spectacle et contrairement à son habitude il l'avait quitté avant la fin.

Les enquêtes succédèrent aux enquêtes pour parvenir à déterminer la cause de l'explosion. On finit par aboutir à cette conclusion, qu'il existait entre le magasin aux poudres et le logement des ouvriers, un réduit. Ce réduit avait servi à recevoir des munitions du temps de l'occupation des turcs, il était inoccupé et fermé. Un ouvrier imprudent avait dû l'ouvrir et y avait pénétré une lumière allumée à la main. Du poussier de poudre en suspension avait pris feu, gagné les poudres et déterminé l'explosion du magasin supérieur.