Les EMSI, Equipes Medico-Sociales Itinérantes
extraits du numéro 49, 3è et 4è trimestres 2011, de "Mémoire vive", magazine du Centre de Documentation Historique de l'Algérie, avec l'autorisation de son président.
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Ici, le 28-12-2011

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Les EMSI, Equipes Medico-Sociales Itinérantes

Rappel historique (1)

" En 1956, le Gouvernement Général de l'Algérie, préoccupé de la situation des femmes et des enfants dans le bled, recrute du personnel féminin ayant une formation sociale et paramédicale dite ASSRA (Adjointe Sanitaire Sociale Rurale Auxiliaire) pour assurer les soins dans les dispensaires disséminés. Placées seules au milieu d'une population à la démographie démesurée, avec les difficultés du terrain, l'insécurité se développant de plus en plus, il n'était plus possible d'envoyer ce personnel dans le bled, ce fut l'échec ".

Création des EMSI

Entre 1957 et 1962, elles ont sillonné le territoire algérien. Aujourd'hui, toujours aussi actives et dynamiques les femmes qui ont composé ces équipes témoignent :

" C'est en partant d'une conviction de l'armée française - par l'évolution de la femme musulmane, l'Algérie trouvera la paix - que les Equipes Médico-Sociales Itinérantes (EMSI) ont été créées en 1957. Elles étaient composées de PFAT (Personnel Féminin de l'Armée de Terre) admises sur leur demande en position hors cadre et d'ASSRA, ayant un statut civil. Une équipe comprenait une européenne et une ou deux musulmanes, les Harkettes. Cette collaboration soudait par le travail des personnes de moeurs et de religions différentes. Soutenues et dirigées par l'Armée, les EMSI, bientôt au nombre de 350 furent installées sur tout le territoire algérien, même dans les endroits les plus dangereux et isolés, de la frontière marocaine à la frontière tunisienne y compris jusqu'au Sahara. De plus en plus actives, elles suivaient au plus près les opérations de pacification, en recherchant la confiance et l'amitié des femmes. Leurs activités étaient très diversifiées. Elles dispensaient des soins médicaux sous la responsabilité d'un " Toubib ", médecin militaire du contingent, dans des infirmeries créées par l'Armée ; la population les avait surnommées " Toubiba ". Elles donnaient des cours d'hygiène, de puériculture, de nutrition pour bébé, de tricot, de couture, de lecture, et d'écriture dans des lieux très divers : cercle féminin, mechta, khaïma (tente), ou même tout simplement sous un arbre, ce qui facilitait les contacts et la création de liens étroits et donnait lieu à des discussions animées. Ces rencontres ame
naient les femmes à une plus grande ouverture sur leur condition de vie. Les EMSI, par leur courage et leur enthousiasme, gagnaient la confiance et l'amitié de la population, leur passage était souhaité et attendu, l'accueil de plus en plus chaleureux. De nombreux chefs de bataillons ont constaté que la présence des militaires dans les villages où les EMSI étaient implantées, était mieux acceptée et que des liens d'amitié se nouaient entre les hommes du village et les militaires. Les EMSI se déplaçaient en véhicules militaires, généralement escortés pendant les opérations. Mais, souvent elles étaient amenées à se déplacer seules, non armées, répondant à un chef de village pour un accouchement ou toute autre raison urgente. Nombre d'entre elles ont trouvé la mort lors d'embuscades, ou ont été lâchement assassinées dans l'exercice de leur fonction, sans parler des enlèvements et du sort qui les attendait - que l'on n'ose imaginer - qu'elles soient européennes ou, pire encore, musulmanes. Les EMSI, par leur courage, leur abnégation et leur action ont bien mérité de la patrie. Elles doivent avoir leur place au sein de la famille combattante avec toute la reconnaissance qui s'y attache ". D. Bargruet et G. Brethes.

Organisation et répartition géographique des EMSI

Dépendantes de l'armée elles étaient réparties en une dizaine de zones. Entre 1957 et 1959 leur effectif est passé de 10 à 388, se stabilisant autour de 350 jusqu'en 1962.


Maison des EMSI à Alger (collection B.Venis)

Les " Maisons " des EMSI

Elles furent créées progressivement de 1957 à 1962 dans différentes zones. A Alger, Madame Maugé, responsable de toutes les EMSI au Sème Bureau de l'Etat-major interarmées, partageait cette tâche avec Mlles Defretière et Estel, les deux Toubiba de " l'Opération Pilote ". Elle avait donc en charge la maison des EMSI au 1 boulevard Victor Hugo et y logeait toutes les volontaires à leur arrivée. Jacqueline Defretière et Yvette Estel s'occupaient de l'accueil et de la gestion.

La devise des EMSI est " Foi, courage, persévérance "

Et c'est là le plus dur car malgré les difficultés, les lassitudes, les faiblesses, il faut persévérer ". Vêtues d'une blouse blanche, portant sur la poitrine l'insigne des EMSI frappé de leur devise, elles allaient courageusement et périlleusement dans les villes, les villages, et les djebels les plus isolés, sillonnant aussi les bidonvilles d'Alger.

" Toubiba " : " Unies dans la joie comme dans l'effort "

C'est le titre du bulletin mensuel, choisi par Mme Maugé, dans lequel figuraient les textes officiels les concernant, les extraits de courriers reçus des EMSI. Cela leur permettait de correspondre entre elles, de suivre le mouvement des effectifs, la situation de chacune (maladie...), ainsi que la liste de celles qui étaient décorées (une soixantaine d'entre elles). Sur les 25 numéros parus entre 1959 et 1962, certains commençaient par " Toubiba en deuil ".

L'embuscade du barrage du Ghrib

" Le 19 janvier 1961, quatre jeunes femmes d'une Equipe Médico-sociale Itinérante s'étaient rendues, dans le cadre de l'assistance médicale gratuite (AMG), auprès des populations regroupées en deux villages à la cote 749, pour y prodiguer des soins. Elles étaient protégées par une unité du 28ème Régiment de Dragons. " La SAS ( Section Administrative Spécialisée ) avait comme à l'accoutumée, mis un véhicule Dodge à la disposition des jeunes femmes avec, outre le chauffeur, quatre hommes armés pour les protéger ". Par ailleurs, l'aumônier militaire Paul Joseph Séïté, accompagné de son chauffeur et d'un " dragon " de protection, qui s'était rendu auprès du détachement en poste à la cote 749, se joignit au convoi du retour à bord de sa 2CV personnelle, profitant ainsi de l'escorte des EMSI. Le convoi s'échelonne alors sur 1,5 km. C'est à proximité du barrage du Ghrib dans la haute vallée du Chélif, à 35 km d'Affreville, qu'eut lieu l'attaque. " A l'approche du poste de Djellida, vers 17h, un groupe d'une quinzaine de rebelles attendait le convoi sur le bord de la route. La première rafale blessa le chauffeur du Dodge, tua la jeune femme qui se trouvait près de lui et deux moghaznis. L'assaut du convoi s'ensuivit et tout alla très vite malgré la riposte des deux supplétifs ". Les rebelles qui ne s'attendaient pas à l'arrivée des derniers véhicules du convoi, prirent la fuite laissant derrière eux sept morts. Le père Paul Joseph Séïté, breton du Finistère, en Algérie depuis trois ans, fut retrouvé le corps lardé de coups de couteaux dont un planté dans la gorge. Au sein de l'EMSI, Christiane Guenon, arrivée de Gironde depuis quelques mois, fut tuée. Les trois jeunes femmes originaires de la région, Kheira-Djémila Madani, M'Barka Kedassa du Ghrib et Saïda Chemla d'Ain Sultan, furent achevées à coups de mitraillettes. Deux moghaznis de la SAS, Tahar Chaouche et Ahmed Taffret, périrent également dans l'affrontement. Il y eut cinq rescapés : le chauffeur du Dodge, celui de la 2CV, le dragon accompagnateur blessé et les deux autres moghaznis.

" Ce carnage témoigne des risques alors encourus, nous rappelle le courage et l'abnégation des EMSI, mais aussi le cauchemar vécu par les rescapés tout au long de leur vie ", insiste Aline, ancienne EMSI.

Aujourd'hui, les noms des quatre jeunes femmes sont inscrits au Mémorial du Quai Branly, ainsi que celui de Germaine Kinzler, PFAT, ayant servi en Indochine puis volontaire pour intégrer les EMSI en Algérie en 1961. Elle a été enlevée avec son chauffeur dans le secteur de Boghari en février 1962 puis tuée par le FLN. Il y eut bien d'autres victimes parmi les EMSI ... leurs dossiers sont en attente pour
figurer sur ce mémorial ". A.M.

La formation au sein des EMSI

Les " Harkettes " étaient des jeunes filles musulmanes qui, au départ, servaient d'interprètes. Elles pouvaient devenir ASSRA, après un stage à Alger, en se formant sur place, en fonction du travail accompli.

Un effort particulier avait été fait pour qu'un grand nombre des jeunes femmes entrées dans les EMSI puissent suivre des stages, à des niveaux différents dans la plupart des zones.

Leur mission

Vivre parmi la population autochtone, la protéger et aider les femmes particulièrement atteintes par ce conflit. En décembre 1959 le commandement de l'armée rappelle aux EMSI que leur mission a pour objectif de s'occuper de 2.000.000 de femmes, soit 7.000 femmes environ par équipe.

Leur action


Une action profonde et réelle ne pouvant se faire que sur 30 à 50 femmes à la fois, il était difficile d'en connaître un plus grand nombre. Les EMSI avaient une tendance naturelle à se consacrer à l'acte médico-social qui ne doit constituer qu'un moyen et non une fin en soi. Elles devaient concrétiser les possibilités d'avenir et donner aux femmes - et aux hommes une excuse pour sortir. Leur action devait être persévérante, renouvelée au moins une fois par semaine, sérieuse, sans visite à la sauvette, entretenue par des femmes qui au-raient été choisies dans les douars et formées. " Nous avons trop à faire, ans un village deux jeunes femmes seront nos )rrespondantes, nous leur confierons quelques tâches dont elles seront fières, elles ourront nous aider. " Zohra Miraoui

Quelques anecdotes de Georgette Brethes

Un jour, nous arrivons dans un douar et commençons l'AMG (Assistance Médicale gratuite). Arrive une mère tenant dans ses bras une fillette de 8/9 ans avec une grosseur phéoménale au cou. Le médecin diagnostique un authrax qui risque d'éclater ; il faut l'hospitaser. Les parents refusent. J'insiste, et propose même de rester avec l'enfant à l'hôpital et de ramener chez eux après la guérison...

Vers 17 heures nous devions rentrer au poste, j'insiste encore ! Soudain la mère me met l'enfant dans les bras, et me dit " prends-la " ! Je fonce vers l'ambulance mais, au moment de monter ... la belle-mère avec violence reprend la fillette et s'enfuit ! L'enfant est morte deux jours après dans de terribles souffrances ! "

****

Le dimanche après midi, j'allais faire jouer des fillettes qui étaient sur les terres de la Compagnie de la Circulation Routière en bordure de Médéa.
Un dimanche, un homme vient me parler : il faut que j'aille accoucher sa femme. Je ne suis ni médecin ni sage-femme. Je lui dis :"Le médecin est à côté de chez vous !Allez le chercher ! "

" Non c'est toi qui doit venir. "

Devant son refus d'appeler le médecin, je me rends chez lui avec l'intention d'aller moi-même chercher le médecin.

Je rentre dans la maison, au milieu de la pièce le corps allongé de sa femme. Une matrone essayait de tirer l'enfant et autour, de nombreuses femmes assises par terre !Je touche les joues, le pouls de la patiente, pas de pouls, elle était glacée, je prends le mari par le bras ! Nous sortons.
" Elle est là depuis combien de temps ? "
" Deux jours ! "
" Votre femme est morte alors que vous aviez le médecin près d'elle !!! "

J'étais malheureuse et en colère contre cet homme qui était venu me chercher sachant que sa femme était morte.

Les femmes ayant entendu mes mots se mirent à se griffer le visage et à pousser des cris. C'était horrible !!! La matrone, je l'avais déjà vue chez une voisine lors d'un accouchement qui s'était très mal passé ! "

****

" Au cours d'une visite à domicile, la maîtresse de maison nous fait asseoir sur des petits bancs. Face à nous, un lit (chose rare) en métal. Elle s'appuie dessus puis s'assoit. On nous sert les rituels trois verres de thé à la menthe. Pendant la conversation mon regard se porte sous le lit et ... je vois le corps d'un homme qui a remué ses grands pieds ! Pensant que l'homme s'est caché à notre arrivée, c'est qu'il ne devait pas avoir la conscience tranquille, je ne dis rien ! Les autres membres de l'équipe n'avaient rien vu de l'endroit où elles étaient assises. Nous avons prolongé jusqu'à l'heure du départ nos échanges, riant parfois de bonnes histoires.

La femme était restée toujours assise sur le lit ( pensant probablement, qu'avec sa grande robe elle cachait l'homme ). L'heure d'aller rejoindre notre véhicule et notre escorte approchant, je me lève suivie par les filles. Embrassades, nous sortons !

Dehors, il y avait un membre de l'escorte. En m'approchant de lui, je lui dis à l'oreille : dans la mechta il y a un homme couché sous le lit ! Nous savions que le FLN venait les nuits dans les mechtas pour manger, prendre des provisions, de l'argent et... violer les femmes ! "

La création des Cercles Féminins

A Alger, en 1957, Madame Massu créa le Mouvement de Solidarité Féminine (MSF) et ouvrit des Cercles Féminins, un peu partout dans le grand Alger.

Sur cet exemple, les EMSI, ouvrirent un ou plusieurs cercles dans leurs zones. La matinée était réservée aux soins médicaux et quand leur emploi du temps le permettait, elles consacraient leur après-midi dans les cercles à la couture, au tricot, ... les liens entre femmes se tissaient autour du thé ou du café au poivre.

" Nous organisions des séances de cinéma, des sorties à la plage. Il y avait aussi, créée par le MSF d'Alger, une émission Radio spécialement vouée aux femmes. Une fois par semaine, nous leur parlions, les invitions à nous rejoindre dans les cercles, elles pouvaient nous parler, dialoguer, demander des conseils. Ces émissions ont eu un immense succès. Une de mes plus grandes joies fut cette jeune femme très belle, ne sachant ni lire ni écrire, parlant très mal le français, cachée sous un voile alors que personne ne l'y obligeait, qui, deux ans plus tard, savait lire, écrire et compter. Elle avait même accepté de parler de temps à autre à notre émission. Je ne l'oublierai jamais... "

La réforme du mariage


" Ce qui les intéressait aussi, et souvent elles me le demandaient, c'était de savoir si l'homme pouvait et avait le droit d'avoir deux femmes... " Réponse : Le coran le dit, la réforme sur le mariage en a respecté le texte. " "

Les jeunes femmes aspiraient à avoir une vie
" à l'européenne ". Elles comptaient sur les EMSI pour les aider à faire comprendre à leurs mères ou grand-mères qu'elles ne voulaient plus être mariées à des vieux. Les adolescentes demandaient souvent une protection pour échapper au mariage forcé avec un vieillard.

Une vieille leur avait dit " pourquoi veux-tu que ma fille soit heureuse ? Moi j'ai toujours été malheureuse. "...
" Au chevet d'une femme très malade que nous devions hospitaliser, mais dont le mari refusait l'hospitalisation - Elle va mourir si nous ne la conduisons pas à l'hôpital - Ça ne fait rien, j'en prendrai une plus jeune. La malade souriait tristement. "

L'ordonnance du 4 février 1959 sur le mariage
des personnes de statut civil local ( lettre 1445) devait être appliquée rapidement. " Vous devez recommencer à en parler aux femmes et leur expliquer que rien ne porte atteinte à l'Islam, dans cette réforme : seules quelques coutumes incompatibles avec la vie moderne ont été modifiées ou abolies ".

Le vote des femmes

Mars 1960. " Si les diverses sections du 3ème Bureau de l'Etat-Major Interarmées sont chargées de gagner la guerre, celle des " Problèmes humains " à laquelle vous appartenez doit gagner la paix. La tâche qui est la vôtre fait appel à vos qualités de coeur et exige que vous compreniez bien le sens de votre combat qui, pour les EMSI, est de donner aux femmes musulmanes les éléments du choix entre la stagnation et l'évolution dans le cadre français ". Colonel Coustaux, chef du 3ème Bureau.

Les élections cantonales ont été une étape importante dans l'évolution du problème algérien. Les anciennes se souviennent du jour où elles ont voté pour la première fois, elles ont dit " oui " à la France. Demain pourquoi voteront-elles ? Parce qu'elles sont Françaises. " L'Algérie ne doit pas être séparée de la France "(2). " Vous devez faire voter. Vous devez voter. Parce que voter c'est travailler au retour de la paix ". (3)

Juin 1961, ...l'ouragan femmes est passé sur nous,... Il nous laisse hébétées, ahuries. Il ne nous appartient pas, à nous, EMSI, de porter un jugement, car que sommes-nous ? Seulement une poignée de femmes qui ont cherché à donner à d'autres femmes le sens du mot " évolution " en passant par les traditions. Seulement cela, c'est tout.

Comment allons-nous nous y prendre ? Que devons-nous dire à nos femmes ? Quelles sont les directives ? " (4)

" Les EMSI des filles comme ça ! "

Christiane Fournier, journaliste, avait été appelée à Alger pour devenir sur place le témoin du travail des EMSI " J'ai le droit de parler parce que je suis l'une des leurs. " En 1957, suite à la parution de son livre, préfacé par le général Challe, des articles ont paru dans plus d'une douzaine de journaux et revues, des conférences ont été faites à Paris comme en Province. La vente du livre se faisait avec la présence de Christiane Fournier et des EMSI en blouse blanche.

" De quoi avez-vous peur ? demandait Christiane Fournier à Fetouma - J'ai surtout peur des chiens dans les douars ".

Il y eut plusieurs émissions : à la télévision française et suisse, à la radio : Paris, Alger, Luxembourg, Lausanne...

Deux films ont été tournés pour faire connaître les EMSI : " Femmes " et " Reviens vite Toubiba ".

" Le colonel Gardes me charge de vous envoyer en cadeau de fin d'année un exemplaire du livre de Christiane Fournier, accompagné de ses félicitations pour votre action généreuse et désintéressée...

Chaque EMSI dont le prénom est mentionné dans le livre recevra un exemplaire numéroté, frappé à son nom. " (5)

Les autres actions des EMSI


Nombre d'entre elles ont encadré plusieurs colonies de vacances en métropole.
" - Je pars en métropole avec mes deux équipières accompagnées de 20 petites musulmanes qui seront reçues par mon département, château tout confort avec parc sur la Loire... La Préfecture m'a aidée dans cette entreprise, pour moi c'est au moins un an de travail de préparation pour les emmener... Elles vivent un véritable conte de fée. La réaction des parents de ces 20 petites est formidable : " tu es kif-kif maman notre fille " ils sont enchantés, il y avait la fête à notre retour...".

" Avec 70 filles musulmanes et européennes, et un encadrement mixte, sur la Côte Vermeille la plage de Banyuls était chaque matin animée par les rires et les rondes de nos fillettes. Monitrices et directeurs prenaient également part aux jeux...".

La reconnaissance de l'Armée

Toutes ces jeunes femmes ont beaucoup donné, leurs récompenses se trouvent souvent dans l'immatériel de leurs tâches.

En 1960, grâce au général Commandant en Chef, le Général Challe, une quarantaine de toubiba des EMSI ont été récompensées de leur travail et sont passées du rêve à la réalité. Organisé par le Corps d'Armée d'Alger un voyage d'information les a menées à Hassi Messaoud....

La fin des EMSI

En octobre 1961, au cours d'un stage à Alger, le Chef d'Etat Major de l'Armée après avoir félicité les EMSI pour leur très bon travail a ajouté "
Maintenant il vous faudra continuer pour l'Algérie algérienne ! ". C'était livrer au FLN les EMSI pieds et poings liés, surtout les musulmanes.

Le travail devint de plus en plus difficile, dans certains régiments les équipes furent dissoutes, certaines, toutes seules, continuèrent leur travail. Elles furent de moins en moins protégées par l'armée, étant des civiles, elles prirent bien des risques.

Le rapatriement

" Les événements de 1962 ont sonné la fin de leur action. Certaines des Harkettes ont été rapatriées en métropole mais la majorité ne pouvant abandonner leur famille ont payé de leur vie leur dévouement à la France ". (6)

L'Assemblée Générale des EMSI 2011

L'association des EMSI, compte à ce jour une cinquantaine d'adhérentes. Elles se sont réunies les 1er et 2 octobre dernier, pour leur assemblée
générale, à Gréoux les Bains, dans une ambiance chaleureuse et émouvante sous la présidence de Mme Georgette Brethes.

Cathy Marthot

1) Maurice Faivre " L'action sociale de l'armée en faveur des musulmans " p49
2) Propos du général De Gaulle en 1959
3) Madame Maugé " Toubiba " N°10 du 26 mars 1960
4) Madame Richard " Toubiba " N°22 du ter juin 1961
5) Madame Maugé " Toubiba " N°6 du 25 décembre 1959
6) Citation de Madame Georgette Brethes
Sources : (consultables au CDHA)
- Maurice Faivre " L'action sociale de l'armée en faveur des musulmans ". Edition L'Harmattan. Janvier 2008.
- Christiane Fournier "Les EMSI des filles comme ça". Librairie Arthème Fayard 1959.
- Les revues " Toubiba " de l'association des EMSI. - Historia magazine N° 229 et 345.