Alger, Algérie : climat, météorologie
A LA SUITE DES CRUES DES OUEDS CORSO ET BQUDQUAOU
INONDATIONS EN BASSE-KABYLIE
1.000 hommes de troupe et pompiers se sont employés à sauver les habitants
L'opération " Atalante " est suspendue
250 millions

Comme les Algérois ont pu s'en rendre compte, dans la nuit d'hier, vers 2 heures du matin, de violents orages se sont abattus sur Alger et dans la région et durant toute la matinée la pluie n'a cessé de tomber.

Si rien n'est à signaler dans la région algéroise il n'en est malheureusement pas de même dans le département et plus particulièrement dans la région comprise entre le littoral, sur le Corso et Courbet et, en remontant vers le sud, à travers les régions de l'Alma, Ménerville, les Issers, puis Saint-Pierre-Saint-Paul et Palestro.

La route nationale Alger-Tizi-Ouzou, d'une part, Alger-Sétif, d'autre part, par Bouira. et la route du littoral par Courbet et Aïn-Taya sont coupées, parfois sur des longueurs dépassant plusieurs kilomètres.

Des villages. comme Le Corso, sont entièrement privés de communications routières.

Dans ces régions vers Tazmalt, Bouira, Palestro, avaient commencé depuis la matinée les manœuvres dites " Manœuvres atalantes " auxquelles participaient des troupes de la division d'Alger et de la division d'intervention algéro-tunisienne.

Plusieurs convois militaires ont été coupés et, bien entendu, il a fallu interrompre, devant la persistance du mauvais temps et le danger de la circulation, tous les mouvements.

Les colonnes motorisées, pour la plupart du 27ème Train. ont regagné Alger dans la nuit, ainsi que les éléments organiques des régiments.

Des hectares de vigne, de cultures maraîchères, des plantations de blé et de tabac ont été ravagées. Sur plusieurs points on signale des voitures emportées par les eaux. Dans la région de l'Alma, Courbet et Le Corso, plusieurs maisons légères occupées par des musulmans ont été également balayées par le courant.

Fort heureusement, grâce aux secours organisés par les habitants eux-mêmes, puis grâce aussi à l'arrivée des secours apportés par les militaires et les pompiers d'Alger, sous la direction du commandant Subra et du capitaine Hourcastagne, toutes les personnes. en danger, dont certains s'étaient réfugiées sur les toits des fermes environnantes, ont pu être sauvées. Il faut signaler que, dans certaines régions. les cultures sont recouvertes par plus de 3 m. D'eau. A l'Alma, notamment, où la circulation est maintenant rétablie, plus d'un mètre d'eau recouvrait les rues.

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Echo d'Alger du 30-3-1950 - Transmis par Francis Rambert
mise sur site :mars 2021
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A LA SUITE DES CRUES DES OUEDS CORSO ET BQUDQUAOU


A LA SUITE DES CRUES DES OUEDS CORSO ET BQUDQUAOU

A LA SUITE DES CRUES DES OUEDS CORSO ET BQUDQUAOU
INONDATIONS EN BASSE-KABYLIE
1.000 hommes de troupe et pompiers se sont employés à sauver les habitants
L'opération " Atalante " est suspendue
250 millions

Comme les Algérois ont pu s'en rendre compte, dans la nuit d'hier, vers 2 heures du matin, de violents orages se sont abattus sur Alger et dans la région et durant toute la matinée la pluie n'a cessé de tomber.

Si rien n'est à signaler dans la région algéroise il n'en est malheureusement pas de même dans le département et plus particulièrement dans la région comprise entre le littoral, sur le Corso et Courbet et, en remontant vers le sud, à travers les régions de l'Alma, Ménerville, les Issers, puis Saint-Pierre-Saint-Paul et Palestro.

La route nationale Alger-Tizi-Ouzou, d'une part, Alger-Sétif, d'autre part, par Bouira. et la route du littoral par Courbet et Aïn-Taya sont coupées, parfois sur des longueurs dépassant plusieurs kilomètres.

Des villages. comme Le Corso, sont entièrement privés de communications routières.

Dans ces régions vers Tazmalt, Bouira, Palestro, avaient commencé depuis la matinée les manœuvres dites " Manœuvres atalantes " auxquelles participaient des troupes de la division d'Alger et de la division d'intervention algéro-tunisienne.

Plusieurs convois militaires ont été coupés et, bien entendu, il a fallu interrompre, devant la persistance du mauvais temps et le danger de la circulation, tous les mouvements.

Les colonnes motorisées, pour la plupart du 27ème Train. ont regagné Alger dans la nuit, ainsi que les éléments organiques des régiments.

Des hectares de vigne, de cultures maraîchères, des plantations de blé et de tabac ont été ravagées. Sur plusieurs points on signale des voitures emportées par les eaux. Dans la région de l'Alma, Courbet et Le Corso, plusieurs maisons légères occupées par des musulmans ont été également balayées par le courant.
Fort heureusement, grâce aux secours organisés par les habitants eux-mêmes, puis grâce aussi à l'arrivée des secours apportés par les militaires et les pompiers d'Alger, sous la direction du commandant Subra et du capitaine Hourcastagne, toutes les personnes. en danger, dont certains s'étaient réfugiées sur les toits des fermes environnantes, ont pu être sauvées. Il faut signaler que, dans certaines régions. les cultures sont recouvertes par plus de 3 m. D'eau. A l'Alma, notamment, où la circulation est maintenant rétablie, plus d'un mètre d'eau recouvrait les rues.

Voici d'ailleurs les renseignements que nous avons pu recueillir sur place, ou que nous ont fait parvenir nos correspondants particuliers :

Dans la région de l'Alma

C'est dans la région de l'Alma, et plus particulièrement sur la route qui rejoint cette dernière localité, à l'Alma-Marine et à partir du point kilométrique 43, sur la route nationale qui conduit à Ménerville que les dégâts sont les plus importants.

L'oued Corso, qui avait roulé toute la nuit des flots limoneux, est subitement, à 9 heures hier matin, entré en crue. Des véhicules qui étaient engagés, à ce moment-là, sur la route, furent balayés comme des fétus de paille par les eaux sorties du lit de l'oued.

Signalons l'accident survenu à la camionnette Chenard et Walcker, d'un commerçant algérois, qui se rendait a un marché : la route n'était recouverte que par 20 à 30 cms d'eau et le conducteur pensait pouvoir passer lorsque la crue subite emporta son véhicule qui, après avoir roulé plusieurs fois sur lui-même, fut entraîné irrésistiblement par le courant. Ce que voyant, son conducteur se débarrassa de sa veste, sauta dans l'eau et eut la chance de pouvoir s'agripper à un arbre, où il resta, transi de froid, de 9 heures du matin à 14 heures avant d'être dégagé par les pompiers d'Alger. La camionnette contenait pour deux millions de tissus et de lingerie qui sont perdus.

Le malheureux commerçant a, en outre, laissé dans l'aventure son portefeuille avec une somme de
70.000 francs.

Cinq autres véhicules automobiles ont subi le même sort que la camionnette et sont inutilisables, mais leurs conducteurs ont pu s'échapper à temps.
Dans les fermes environnantes les déeåts sont considérables. Sur des hectares entiers les vignes ont été arrachées, les plantations de tabac ont été rasées, le blé, l'orge ont été couchés par la violence du flot.

Dans les vignes les plants qui bourgeonnaient ont été dévastés.

Hier, enfin d'après-midi, de longues files de camions et de cars réussissaient à passer à très faible allure, car la boue laissée par les eaux, qui se sont en partie retirées de la chaussée atteint une hauteur de 10 à 15 cms.
Signalons, cependant, que jusqu'à présent la circulation n'est possible qu'aux gros véhicules. mais demeure toujours interdite aux automobiles.

Marins et sapeurs du génie sauvent une famille

Sur la route de l'Alma à l'Alma-Marine, l'oued Boudouaou, qui est sorti de son lit, a causé de très
gros ravages. L'eau atteint dans les champs une hauteur de 1 m. 50. A 12 heures, les sapeurs-pompiers d'Alger qui avaient été appelés d'extrême urgence, ont réussi à dégager les habitants de la ferme Pujet, qui s'étaient juchés sur le toit de l'habitation pour éviter d'être emportés par la crue. Ce n'est qu'après plusieurs heures d'efforts que les pompiers réussirent à mettre les habitants à l'abri. Dans les dépendances de la ferme, le cheptel et de nombreux gourbis ont été emportés.
Hier, en fin d'après-midi, vers 18 heures, les fusiliers-marins du centre " Sirocco ", avec leurs " dinghies ", le 19' Génie avec des bateaux å fond plat. ont dû intervenir pour sauver les habitants d'une maison encerclée par les eaux, à proximité de la gare. Après de nombreux efforts, trois femmes, dont une très âgée, et un enfant faisant partie de la famille Sidi Ali Mohamed, brocanteur å l'Alma, ont réussi a être sauvés.
La briqueterie Mas et Torelli est complètement encerclée par les eaux et les fours ont dû être défoncés pour éviter les explosions. A la Tabacoop, les sous-sols ont été inondés. Enfin. toujours sur la route de l'Alma a l'Alma-Marine, une camionnette a dérapé et, après avoir heurté un arbre, s'est complètement renversée dans un fossé profond de 1 m, 50. Son conducteur a été légèrement blessé à la face.
Au Corso
La crue de l'oued Corso a été profondément ressentie au village où les vignes. les vergers et les jardins maraîchers ont été dévastés. La hauteur de l'eau atteignait trois mètres.
A la propriété Bergeot, la crue a surpris, dans une maisonnette, le jardinier de la ferme, M. Riéra, ainsi que le gardien, M. Rabah, qui sont restés pendant 6 heures attendant les secours qu'on ne pouvait leur porter étant donné la violence de la crue. La situation devenant critique deux indigènes, les frères Ahmed et Rabah Medad n'hésitèrent pas à. se lancer dans les eaux et, à l'aide d'une corde, réussirent à ramener les deux rescapés. Ces deux sauveteurs doivent être félicités pour leur courage et leur mépris du danger. ainsi que toutes les personnes qui ont participé au sauvetage.
Un camion militaire bloqué par les eaux
Sur la route départementale qui longe le littoral, la voiture de dépannage de la base aérienne de Réghaïa qui revenait de participer aux sauvetages des deux rescapés de la ferme Bergeot, a été emportée par la crue soudaine de l'oued Corso.
Douze hommes étaient a bord. Sous la violence du courant, le véhicule fut entraîné dans le lit de l'oued sur plus de 150 mètres et s'immobilisa. Devant le danger, trois soldats et un capitaine sautèrent dans l'eau et réussirent à atteindre la berge. Cependant. la situation devenait très critique pour les huit aviateurs qui étaient encore à bord.
On fit appel aussitôt aux fusiliers-marins du centre " Sirocco " › et au 19° génie qui, après de nombreuses tentatives, réussirent, vers 17 h., à établir un va et vient. Les soldats purent alors être sauvés.
A Courbet
La crue a atteint une intensité moins grande å Courbet. Cependant, la route a été coupée entre ce centre et Félix-Faure. Les cultures maraîchères ainsi que les vignes ont été recouvertes par l'eau qui
atteignait une hauteur de 50 cm. environ. Toutefois les dégâts ne sont pas très importants.
A Félix-Faure
La pluie qui tombait en bourrasques depuis 8 heures du matin eut tôt fait d'inonder la plaine ou le
niveau de l'eau atteignit de 60 à 70 cm. Les vignobles, les jardins, ainsi que les cultures maraîchères
sont complètement submergés.
Certaines habitations en rez-de-chaussée dans le centre de Félix-Faure ont été envahies par 10 à
15 cm. d'eau et les habitants ont dû évacuer leurs logis. Les gendarmes de Ménerville se sont rendus de toute urgence à la ferme Lanter pour porter secours aux habitants.
Toutes les voies de communications sur Courbet, Tizi-Ouzou et Alger ont été momentanément coupées. Mais, en fin d'après-midi, la circulation, quoique difficile, était partiellement rétablie.
Aucun accident de personne n'a été signalé.
Aux lssers
La situation est moins grave aux Issers, mais la pluie qui est tombée toute la journée sans discontinuer a fortement grossi l'oued Issers qui a débordé entre le pont et la briqueterie Lanter, à 1 km. des Issers, interrompant la circulation sur Félix-Faure et BordjMénaïiel. La voie ferrée a été coupée et les trains ne circulaient plus entre Alger et Tizi-Ouzou.
Plusieurs vignes ont été submergées ainsi que des champs de céréales et un vent violent soufflant en
bourrasques a couché les récoltes.
A St-Pierre-St-Paul
La route qui va de St-Pierre-St-Paul à. Keddara, a été coupée par les inondations à partir de 16 heures, interrompant la circulation de tous les véhicules qui ont été immobilisés. De Keddara, vers Palestro, de nombreux éboulements ont eu lieu sur la route nationale, la coupant sur plus de 150 mètres en de nombreux endroits. Des voitures militaires qui participaient aux manœuvres ont été immobilisées. Signalons, entre autres, qu'un éboulement s'est produit au passage de deux véhicules militaires, mais les soldats ont réussi à se dégager à temps. Pour le moment, la troupe est immobilisée au café maure de Djeloula.
Dans les autres régions `
Cette crue s'est également manifestée å Rouïba, au Hamiz, à Ménerville, ainsi que dans toute cette
région. Au pont du Hamiz, l'oued Hamiz roule un fort courant limoneux et a débordé légèrement. Dans les bas-fonds. les cultures ont beaucoup souffert. Toute la plaine est recouverte par l'eau qui atteint, en moyenne, une hauteur de 50 cm.
Le rapide Alger-Constantine a été bloqué à Béni-Mansour
Enfin, dans la région de Maillot et Beni-Mansour, de fortes pluies sont tombées causant des inondations partielles et des éboulements.
Le train qui avait quitté Alger hier matin, en direction de Constantine, a été bloqué en gare de Beni-Mansour et est arrivé à Constantine avec un retard de plus de cinq heures.
Les personnalités sur les lieux
Dès qu'il a été au courant de ces inondations, M. Massari, secrétaire général de la Préfecture. s'est rendu sur les lieux. M. Vogt, premier adjoint au maire de la ville d'Alger, a également visité les lieux sinistrés. .
250 millions de dégâts
Les dégâts sont considérables. On ne peut encore les évaluer, mais les dommages causés aux vignes, aux cultures de tabac, aux cultures maraîchéres peuvent se chiffrer à première estimation à environ 200 à 250 millions.
Nous ne saurions terminer sans signaler le merveilleux travail de sauvetage accompli tant par les
pompiers d'Alger que par les fusiliers-marins du centre " Sirocco " et par les sapeurs du 19ème génie qui mirent en œuvre tout leur matériel disponible pour venir en aide à tous ceux qui étaient en péril. De nombreux sauveteurs anonymes et bénévoles se mirent spontanément à la disposition des autorités.
Les contingents de troupe et les pompiers qui ont participé à ces sauvetages dépassent 1.000 hommes
Routes coupées à la circulation
Le service des Ponts et Chaussées communique :
La route nationale n° 5 d'Alger å Constantine est coupée au-delà de Beni-Amran par suite de la destruction d'un pont. On peut aller à Palestro par Fondouk, l'Arbatache et Keddara. malgré des éboulements qui gênent la circulation, et a Bouira par l'Arba, Tablat, Bir-Rabalou, Aïn-Bessem.
Dans la journée du 29 mars, des inondations ont interrompu la circulation sur plusieurs routes et chemins de la région de l'Alma, Ménerville, les Issers. Mais le passage sera vraisemblablement possible le 30 mars.