Alger, Algérie : documents algériens
Série économique : agriculture
le figuier et l'exportation des figues en algérie
4 pages - n°67 - 10 mars 1950

 

mise sur site le 22 -03-2005
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----------Parmi les exportations de fruits algériens, les figues sèches, dont 234.392 quintaux ont été expédiés vers la métropole au cours de la campagne 1948-1949, tiennent la troisième place après les agrumes et les dattes. Il est facile (le se rendre compte de l'importance de cette culture essentiellement développée en milieu musulman et tout particulièrement en Kabylie, si l'ont tient compte de ce que le gros de la production est conservé sur place par le producteur en vue de lui fournir ses réserves alimentaires d'hiver. En effet, la figue sèche, aliment riche en sucre (55 % environ) et en sels de calcium, constitue avec l'huile d'olive la base de la nourriture des populations kabyles.
----------Or, depuis 1947, les difficultés d'écoulement de la production en figues sèches ont fait naître des inquiétudes sérieuses dans tous les milieux intéressés, agricoles, commerciaux et industriels. Tour à tour, la qualité de la figue algérienne et la concurrence dont elle est l'objet en France de la part des produits italiens, grecs et turcs ont été mises en cause. Il apparaît maintenant nettement qu'après la période de facilité commerciale des années de pénurie, il faut revenir aux traditions d'avant-guerre et pratiquer une politique de qualité. Le problème étant ainsi posé, il s'agissait de trouver les solutions propres à le résoudre. Ce fut le but du Congrès Algérien de la Figue qui s'est tenu à Bougie du 3 au 5 septembre. Solutions immédiates quant à l'amélioration et aux traitements de la production actuelle, solutions lointaines quant à l'avenir de la production figuière algérienne ont été proposées au cours de cette manifestation où toutes les questions relatives au produit considéré furent traitées par des hommes d'expérience appartenant à l'administration, à l'agriculture, au commerce ou à l'industrie souvent depuis de longues années.

CARACTERES BOTANIQUES.

----------La recherche de l'origine des figuiers cultivés est rendue extrêmement difficile par la confusion des formes du "ficus carioca " croissant à l'état spontané ou subspontané dans les zones tempérées du vieux monde. On rencontre des figuiers non cultivés depuis les Canaries jusqu'aux Indes, en passant par les côtes de l'Océan Atlantique, les pays méditerranéens, l'Abyssinie, l'Arabie, la Mésopotamie, la Perse et l'Afghanistan.
----------Ce que l'on peut assurer c'est que le figuier est un arbre fruitier exploité depuis la plus haute antiquité. Théophraste affirmait déjà la nécessité pour certaines races de figuiers d'être fécondées pour donner (le bons fruits. Aristote en parlait également. Il semble donc impossible de définir non seulement l'origine botanique du figuier cultivé, mais aussi l'époque (le sa mise en culture dans le bassin méditerranéen et plus particulièrement dans le Nord (le l'Afrique.
----------On classe les figuiers cultivés en trois catégories .
-- Les Caprifiguiers ou Dokkars ou figuiers mâles, dont les fruits impropres à la consommation sont utilisés pour la fécondation de la plupart des figues comestibles.
- Les figuiers bifères ou Bakors, donnant des fruits utilisables à l'état frais.
- Les figuiers d'automne produisant les figues de séchage.

----------Les figuiers cultivés appartiennent à l'espèce " Ficus carica " L. Ce que l'on considère comme un fruit est en réalité un réceptacle de forme concave où sont fixées un grand nombre de fleurs uni-sexuées. Mais tandis que les fleurs mâles en nombre restreint et groupées dans la partie supérieure du réceptacle ont la même structure chez les différentes variétés du figuiers, les fleurs femelles ont un style court chez le caprifiguiers et long chez les figuiers hifères et les figuiers d'automne.
----------Dans tous les figuiers, la maturité du pollen n'ayant lieu que plusieurs semaines après celle des stigmates des fleurs femelles, l'auto-fécondation est rendue impossible. La fécondation est cependant indispensable chez certaines variétés pour obtenir une production commerciale. Elle s'effectue grâce à un insecte (Blastophaga) qui vit dans les fleurs femelles du caprifiguier. Chez les caprifiguiers la dernière série ode fruits apparue à la fin de l'été a son évolution suspendue par l'arrêt de végétation dû aux premiers froids et ne se développe qu'au printemps suivant. A ce moment apparaissent d'autres fruits utilisés pour la caprification (ce terme désigne la fécondation spéciale du figuier). Ces figues dites mâles ou dokkars portent des fleurs femelles à style court où les blastophages déposent leurs pontes. Les larves qui en éclosent se développent au détriment des graines et les insectes adultes sortent au moment de la maturité physiologique du dokkar, c'est-à-dire lorsque les fleurs mâles de la périphérie du réceptacle sont abondamment pourvues de pollen.
----------Les Blastophages couverts de poussière fécondante vont alors visiter et féconder les fruits des autres variétés de figuiers dont la structure différente des fleurs femelles s'oppose à ce qu'ils puissent y déposer leurs pontes.
----------On favorise la fécondation des figues d'automne en suspendant dans les figuiers cultivés " femelles " des chapelets de trois à cinq dokkars ayant atteint leur maturité et dont les blastophages sont prêts à sortir. Cette opération débute en juin, au moment où les figues les plus avancées (les figuiers femelles ont atteint la dimension d'une noisette, et se renouvelle tous les 8 ou 10 jours, jusqu'au début juillet. Les figues fécondées poursuivent normalement leur évolution, restent fermes et grossissent rapidement. Par contre, les autres ne tardent pas à perdre leur bel aspect ; leur surface se ride longitudinalement, leur teinte tourne au jaune et leur flétrissement s'accentue jusqu'à leur chute.
----------La fécondation des figues avait intrigué les observateurs de l'antiquité comme Aristote et Ibn-elAouam. Elle a fait depuis l'objet des travaux plus ou moins complets et contradictoires et il a fallu arriver à la fin du siècle dernier pour avoir une explication scientifique précise de la biologie du Blastophage et de son rôle dans la fécondation des figues. Le caprifiguier est maintenant universellement reconnu comme la source principale de la fertilité du figuier femelle et l'élément indispensable à l'économie de son exploitation. Il faut toutefois signaler que certaines variétés de figues (Dottato, Bouankirk) donnent des fruits comestibles et appréciés en raison de leur faible quantité de graines, par suite (le leur développement en l'absence de caprification.

----------- Les Figuiers bifères fructifient deux fois par an. l.a première série (le fruits hiverne à l'état latent sous forme de petits bourgeons semblables à ceux que donnent les dokkars et mûrit en juin-juillet. La seconde apparaît au début du mois de juin sur les pousses de l'année pour mûrir en août-septembre. La plupart (les variétés de cette catégorie (Abakors) donnent des fruits impropres au séchage.
------------ Les Figuiers d'automne présentent une évolution très lente de la fructification et ne donnent qu'une seule série de fruits arrivant à maturité fin août et début septembre. Ces figues se développent sur les pousses de l'année. Les premières formées arrivent à temps pour être caprifiées tandis que celles dont la formation a débuté tardivement viennent après l'époque de maturité des dokkars et n'étant pas caprifiées ne parviennent généralement pas à maturité.
----------Les figuiers d'automne donnent la masse des variétés cultivées pour le séchage de leurs fruits (Abougandjour, Adjaffar, Agouarzguilef, Agoussim, Alekake, Avouzegar, Azaich. Azendjar, Smyrne. Tabelout, Tadefouit, et surtout Tameriout et Taranimt).

CULTURE DU FIGUIER EN ALGERIE.

----------Régions de culture.

----------Le figuier se rencontre en petites plantations un peu partout en Algérie ; en Oranie, aux environs de Mostaganem, Clinchant, Perrégaux, Mascara, dans le Constantinois, mais sur les 7.600.000 figuiers que compte l'Algérie, plus de 6.ooo.ooo d'arbres sont concentrés dans les seuls arrondissements de TiziOuzou et de Bougie. Pour cette raison il est d'usage de s'attacher plus spécialement à l'étude de figueraies kabyles qui forment le fond de la production algérienne. Si la culture du figuier en Kabylie revêt un caractère ancestral et si l'esprit de tradition, si fortement empreint chez le paysan, lui fait encore appliquer certaines vieilles méthodes qui ne cadrent pas toujours avec les connaissances actuelles, particulièrement en ce qui concerne la caprification et le séchage des récoltes, il faut toutefois reconnaître qu'il a fort souvent tiré parti au maximum de ses ressources et qu'il ne faudra pas espérer de son éducation et de la généralisation des améliorations culturales une influence très sensible sur la production.
----------Certes, les figueraies kabyles sont parfois établies sur des terrains argileux, peu propres à cette culture, la densité des plantations y est souvent excessive, la taille gagnerait à y être effectuée d'une manière plus soigneuse et la plantation de dokkars devrait être généralisée. Cependant, il est un facteur sur lequel l'homme n'a aucun pouvoir, et qui est capital, dans cette culture, c'est le climat. Les stations de séchage kabyles sont handicapées par une pluviométrie supérieure à celle des régions étrangères productrices de figues.
----------Si la Californie obtient un produit de qualité, elle le doit non seulement aux soins pris par le producteur mais surtout à un climat qui se prête admirablement bien au séchage. Si les planteurs californiens se sont installés aux environs de Fresno, c'est pour tirer partie d'un climat idéal.
----------En Kabylie, les causes qui déterminèrent la plantation de figuiers sont tout à fait différentes on a essayé d'exploiter au maximum un état de fait existant, c'est-à-dire une production venant sous un climat peu favorable au développement d'une industrie du séchage. Certes, les meilleures variétés pour l'exportation, Taranimt et Tameriout se sont étendues mais certaines années le séchage est si difficile que la qualité du produit final s'en ressent fortement.
----------La seule solution, si l'on veut créer en Algérie une industrie de la figue capable de s'imposer sur les marchés étrangers, serait de l'installer dans des régions de climat plus sec. Certains périmètres ont déjà été prospectés dans ce but par le service chargé de l'arboriculture au Gouvernement général. Ils seront probablement, dans quelques années, des zones d'extension de la culture du figuier, telles les régions situées
----------1°/ au Sud de Sidi-Bel-Abbès, Mascara et Uzès-le-Duc dans les vallées des oueds El - Abd et El-Taht ;
----------2°/le long des cours du Chéliff, de l'oued Riou et de la Mina, depuis Lavigerie jusqu'à Perrégaux en passant par les Attafs, Orléansville, Relizane, Saint-Aimé, les contreforts sud de la Kabylie ;
----------3°/quelques périmètres entre Guelma et Constantine et au Nord du Djebel Onk ( Un prochain Document Algérien : LES ZONES D'EXTENSION DES CULTURES FRUITIERES EN ALGERIE, de M. Rebour, chef du Service de l'Arboriculture au Gouvernement général, fera le point exact de cette
question
.). Mais ces déplacements de culture constituent des projets d'avenir assez lointains.

----------Multiplication du figuier.
----------Les mutations gemmaires n'étant qu'exceptionnelles chez le figuiers, la multiplication par bouture ne présente aucun inconvénient. Par contre, le semis susceptible de procurer par sélection des sujets encore plus rustiques ne donne souvent naissance, en raison de la fécondation par le caprifiguier, qu'à des sujets ne présentant aucun intérêt et d'une mise à fruits bien plus longue.
----------Les cultivateurs kabyles multiplient en général le figuier par boutures effectuées en pépinières où les sujets séjournent deux ou trois ans. Mais trop souvent les jeunes plants ont un tronc trop élevé occasionnant une plus grande évaporation de leurs réserves aqueuses pendant la reprise.
----------Le greffage en couronne et surtout en écusson est pratiqué couramment pour la transformation d'un dokkar ou d'une variété sans intérêt en figuier productif.

----------Plantation.
----------Après avoir opéré un défoncement dans le cas de sols argileux ou pierreux. les jeunes sujets sont plantés à une distance de 6 ou 8 mètres suivant les variétés.
----------Le plus grave défaut des plantations kabyles est la hauteur des troncs de leurs arbres qui, soumis au surchauffage par le soleil, vieillissement prématurément. Il est évident que dans ce pays où les températures d'été sont extrêmement élevées, les formes basses présentent le double avantage d'éviter le dessèchement des troncs et du sol et de faciliter les récoltes et les soins culturaux.

DEUX ASPECTS CARACTÉRISTIQUES DE LA FIGUERAIE KABYLE

----------La densité des plantations et le choix des variétés sont fonction de la pluviométrie

les plantations de la zone pluvieuse
----------Ci-dessus, les plantations de la zone pluvieuse : arbres à forte végétation, groupés en masses compactes (Environs de Fort-National - Pluviométrie 1.035 m/m.)
----------Ci-dessous, les vergers de la zone sèche : arbres clairsemés, de vigueur modérée. (Guezgour - Pluviométrie 473 m/m.)

les vergers de la zone sèche
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--La première région cultive la variété Taranimt, plus facile à sécher. Le Guezgour produit Tameriout, à peau mince et à chair abondante dont la lenteur de dessiccation exige un climat peu pluvieux.

----------Caprification.
----------Bien que la caprification soit presque toujours indispensable à l'obtention de bonnes récoltes, sa nécessité est encore très souvent mise en doute par certains agriculteurs kabyles qui tout en la pratiquant ne cessent pas d'admettre la possibilité de fécondation des figues par toutes sortes de
facteurs autre que le blastophage.
----------Afin de se dispenser de la caprification, certains cultivateurs ont eu l'idée d'intercaler dans leurs plantations quelques dokkars. Ce procédé présente l'inconvénient de favoriser une caprification excessive sur les figuiers femelles environnant chaque dokkar et insuffisante sur ceux qui sont le plus éloignés.
----------Pourtant dans l'ensemble, les cultivateurs hésitent à planter des dokkars dans les nouveaux vergers, comptant sur les fruits mâles qui sont offerts sur les marchés et dont le prix atteint souvent un franc la pièce.
----------La bonne méthode consiste à organiser une plantation de dokkars donnant de nombreuses figues d'hiver (comme Palmata, qui a été introduit récemment à la station de Sidi-Aich), distante de celle des figuiers femelles en évitant de la placer sous les vents dominants du mois de juin qui risquent de
favoriser la migration des blastophages indésirables, provenant de dokkars malades vers les arbres du verger. La sélection des variétés de caprification a été entreprise la station expérimentale de Sidi-Aïch où des sujets américains et tunisiens ont été introduits.

----------Récolte.
----------Suivant qu'il s'agit de fruits destinés à la consommation en frais ou à être séchés, deux stades de maturité sont à considérer.
----------Les premiers sont cueillis au moment où ils cèdent sous la simple pression des doigts, les seconds bien plus tard lorsqu'ils ont acquis une consistance pâteuse, une teneur en sucre maxima, et qu'une simple secousse sur la branche qui les porte suffit à les faire tomber sur le sol.
----------L'époque de récolte pour le séchage ne débute pas avant la troisième semaine d'août et s'échelonne jusqu'à la fin septembre.

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SÉCHAGE.

----------Jusqu'à ce jour le séchage (les figues est effectué en Algérie par le cultivateur. Malheureusement ;i le Kabyle est un producteur averti, il ne s'est montré qu'un industriel médiocre. Il reste attaché aux traditions de son milieu et traite sa récolte avec l'aide de sa famille, suivant ses goûts personnels, sans tenir compte de ceux de la clientèle lointaine à qui est destinée une partie de sa production. Il compte sur le conditionneur-exportateur pour rendre sa production présentable. Ce dernier se trouve la plupart du temps devant des fruits non triés dont bon nombre sont parasités, moisis, fermentés, scléreux ou trop secs. D'où augmentation des frais de conditionnements occasionnés par le triage, la préparation (les 'fruits et par l'importance vies déchets. Il faut donc reconnaître qu'un chaînon essentiel manque à la production algérienne de figues : le séchage de qualité qui seul lui permettra de soutenir la concurrence des produits similaires étrangers.
----------Un séchage rationnel a pour but de faire passer la teneur en eau de la figue de 38 à 5o % au moment de la cueillette à 25 ou 30 en fin de séchage, ce dernier chiffre étant le maximum toléré pour l'exportation. A ce stade de dessiccation, la concentration en sucre qui atteint ou dépasse 5o % joue le rôle d'antiseptique, constituant un milieu visqueux défavorable à la vie des microbes. Le fruit sain placé à l'abri (le l'humidité et protégé des attaques parasitaires par un emballage convenable se conserve ainsi parfaitement. Pour avoir un fruit de belle apparence et sain, des opérations préliminaires au séchage lui-même sont indispensables. Malheureusement, malgré l'action entreprise auprès des producteurs, elles restent en Algérie trop souvent théoriques et ne sont effectivement réalisées que sur des quantités infimes.

----------Triage.
----------Le triage au séchage peut s'effectuer à divers stades soit avant, soit en cours de séchage. soit après. Mais il semble bien que ce soit le triage exécuté soigneusement avant séchage (lui donne les meilleurs résultats. Pour avoir un séchage régulier, il est indispensable de grouper les fruits (le même grosseur, de même maturité et de même degré de dessiccation. Après avoir éliminé tous les fruits détériorés pendant la cueillette (les fruits trop aqueux qui aigrissent facilement et les figues trop sèches, où les vers sont a craindre) les autres sont trempés dans l'eau bouillante salée.

----------Le trempage.
----------Cette opération consiste à tremper les figues fraîches dans une solution saline bouillante qui a pour but de coaguler les matières albuminoïdes et pectiques, de dissoudre les gommes et mucilages du réceptacle du fruit, de faciliter son séchage en le rendant plus perméable et, enfin, de le nettoyer extérieurement.
----------L'eau doit être maintenue au voisinage de son point d'ébullition. la concentration du chlorure de sodium étant de 4 % Dans ces conditions le trempage du fruit doit durer suivant les espèces traitées de 40 à 7o secondes.

----------Sulfitage.
----------Les figues sortant du trempage sont alors exposées, dans une enceinte close, à des vapeurs de gaz sulfureux (S02). ----------L'acide sulfureux formé sur la surface humide de; figues semble être l'élément actif (lu blanchiment. Antiseptique puissant, le gaz sulfureux arrête les fermentations et les oxydations, tue certains parasites tandis que son odeur, qui disparaîtra pendant le séchage. éloigne les insectes (mouches et teignes).
----------Le S02 nécessaire à cette opération est obtenu par la combustion directe de soufre à proximité (les claies où sont rangées les figues sèches. Etant plus lourd que l'air ce gaz doit circuler de haut en bas, ce qui est obtenu soit par dispositifs spéciaux (cheminée de combustion. ventilation), soit par l'emplacement du foyer dans les parties hautes de l'enceinte (le sulfitage.
----------On utilise en général 35 à 50 grammes de soufre par mètre Cube de chambre et la durée d'exposition est d'environ 30 à 5o minutes.

----------Séchage naturel.
----------L'emploi d'évaporateurs et de séchoirs industriels n'est pas encore entré dans la pratique courante en Kabylie en raison du coût élevé des installations et cependant il présenterait un intérêt certain dans ce pays où le climat est peu favorable au séchage en raison d'une hygrométrie élevée et des pluies fréquentes en septembre. Malheureusement les dépenses (le combustibles grèveraient lourdement le produit.
----------On procède donc au séchage naturel par utilisation de la chaleur solaire. Les figues sont disposées sur des claies étalées à proximité des chambres de sulfitage et sur un terrain bien ventilé. Après avoir séjourné de 1 à 3 jours au soleil suivant la rapidité de dessiccation, les fruits achèvent de sécher lentement à l'ombre ce qui conserve à la peau toute sa souplesse et donne finalement un produit de qualité supérieure.
----------La dessiccation est arrêtée lorsqu'au toucher le fruit présente une certaine élasticité.

----------Ressuage.
----------Cette opération a pour but d'uniformiser le degré de dessiccation du produit et (le donner un peu de souplesse aux figues légèrement trop sèches.
----------En fin de séchage les fruits sont entassés dans des coffres où les plus humides perdent leur eau au bénéfice des plus secs ; ces coffres servent également pour la conservation des réserves familiales.
----------Les bons résultats ne sont obtenus qu'avec 2 ou 3 brassages échelonnés sur les 6 ou 10 jours que dure cette opération.

PRÉSENTATION DES PRODUITS

----------Avant 1914, les exportateurs algériens de figues, parfaitement triées, avaient réussi à conquérir le marché métropolitain. La concurrence étrangère et une clientèle plus difficile furent les causes de la diminution progressive de nos exportations. C'est pourquoi il fallut adopter en Algérie les méthodes modernes. c'est-à-dire le conditionnement et la standardisation.

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Conditionnement.
----------Après la Semaine du Figuier qui tint ses assises en 1930 à Bougie, après la propagande active entreprise par les services techniques de l'OFALAC, les exportateurs algériens s'outillèrent et montèrent leurs usines suivant les directives données, ce qui leur permet d'appliquer maintenant, dans une centaine d'ateliers capables de traiter mensuellement 10.000 tonnes de fruits, un conditionnement très poussé dont le processus est le suivant :
----------Les figues. " tout venant ", livrées par les producteurs et souvent séchées d'une manière rudimentaire, après la cueillette sont soigneusement triées puis passées dans des laveurs continus spéciaux où elles sont plongées dans de l'eau bouillante salée. Rincés, les fruits passent dans des sécheurs où température et degré hygrométrique soigneusement réglés permettent l'obtention de figues souples et moelleuses selon le goût du consommateur européen. Après refroidissement complet les produits sont emballés avec tous les soins désirables. suivant les différentes présentations prévues par la standardisation.

----------Standardisation.
----------La première réalisation de la standardisation des figues fut l'institution de la marque " Algéria " qui fut appliquée dès 1932 ; ce fut en quelque sorte une standardisation facultative qui permit d'éduquer les premiers conditionneurs algériens qui voulurent bien se soumettre à la discipline qui leur était demandée et d'entreprendre en même temps une action auprès des consommateurs en vue de restaurer la confiance qu'ils avaient perdue dans la qualité des fruits algériens.
----------Cependant le principe même de la standardisation, tel qu'il reste en vigueur à l'heure actuelle est tiré du décret du 23 décembre 1936 dont la base juridique reste la loi du 1" août 1905 sur la répression des fraudes.
----------Le 19 juillet 1937, un arrêté gubernatorial fixait les règles applicables à la standardisation des figues sèches à leur sortie d'Algérie. A la' lumière (le l'expérience acquise et sous l'impulsion des organismes professionnels, ce texte fut remanié à de nombreuses reprises pour aboutir enfin à l'arrêté du 28 novembre 1946 actuellement en vigueur.
----------Aux termes de ce texte :
----------1° les conditionneurs doivent être agréés par 1'OFALAC et leurs installations soumises à son contrôle.
----------2° Suivant leur grosseur et leur qualité, les figues consommables sont obligatoirement classées en cinq catégories : " marchand ", " standard ", " extra ", " supra " et " écarts de triage ".
----------L'arrêté stipule pour chaque dénomination les standards exigés et les tolérances admises, ainsi que les modalités de présentation d'emballage et de marquage. Les figues écrasées, impropres à la conservation, à peau noire, doivent être expédiées sous la dénomination " Figues sèches d'Algérie industrielles ".

DESINSECTISATION.

----------L'Algérie a été un des premiers pays à avoir créé dans tous ses ports des installations modernes de désinsectisation. ----------C'est ainsi que le règlement de standardisation des figues rend l'opération de désinsectisation obligatoire. Les figues emballées sont, après le contrôle de 1'OFALAC, traitées dans des tanks spéciaux, sous vide partiel, par un mélange d'oxyde d'éthylène et de gaz carbonique. Ce mélange gazeux est absolument inoffensif pour l'homme mais mortel pour les insectes et leurs neufs. Or, on sait qu'au cours des nombreuses manipulations de séchage, aussi bien aux champs que dans les magasins, les figues sont soumises aux attaques incessantes des insectes parasites et deviennent véreuses. Les plus redoutables de ces insectes sont deux papillons, Le Myloïs et l'Ephestia.
----------Après un passage de 4o à 4o minutes dans le tank autoclave tous les poufs d'insectes qui se trouvaient dans les figues sont détruits et ces fruits mis en vente, même après plusieurs mais, ne subissent aucune altération et ne sont pas véreux.
----------Toutes ces opérations de désinsectisation sont effectuées et contrôlée, par le Service de la Défense des Cultures du Gouvernement général.

PRODUCTION ET EXPORTATION DE FIGUES SÈCHES.

----------La production de figues fraîches est en augmentation sensible depuis 1939. La consommation de ces fruits à l'état frais étant à peu près la même qu'à cette époque, les quantités soumises au séchage .ont donc en nette progression, pratiquement elles ont plus que doublé. D'après les statistiques agricole~ publiées par la Direction de l'Agriculture du Gouvernement général, les productions en frais et ce sec ont été les suivantes au cours de ces dix dernières années

 

Production totale en frais (qx)
Consommés à l'état frais (qx)
Soumises au séchage(,qx)
Production de figues sèches (qx)
1939
633.500
237.500
396.000
185.000
1940
733.000
338.000
405.000
200,000
1941
682.500
323.000
359.500
172.000
1942
56o.6oo
294.000
266.600
135.200
1943
621,000
270.000
351.000
156.100
1944
490.000
288,000
202.000
86.300
1945
595.300
360.300
235.000
94.800
1946
700.500
300.500
400.000
206.000
1947
1.146.900
276.000
87o.900
446.800
1948
1.155.300
268.400
886.900
388.6oo
1949
-
-
-
-

----------Il est probable que ces chiffres ne représentent que l'excédent de la consommation annuelle des producteurs et paysans kabyles, qui est en général estimée à 100 kilos par habitant de ces régions. Les exportations sur la métropole ont été les suivantes, ces dernières années:
----------Campagne
1939-1940
---------- 57.200 quintaux
1940-1941
---------- 200.000 -
1941-1942
---------- 56.400
1942-1943
---------- 15.000
1943-1944
----------15.000
1944-1945
----------15.000
1945-1946
---------- 17.400
1946-1947
---------- 159.200 dont 1.300 qx sur la Tunisie
et 300 qx sur l'A.O.F.
1947-1948
---------- 368.400 -
1948-1949
---------- 234.400
1949-1950
(1er mars 1950)-139.400

LES DÉBOUCHÉS.

----------Le volume de figues exportables qui se situait entre 70.000 et 100.000 avant-guerre est passé à 250.000 quintaux environ. La consommation métropolitaine d'avant-guerre (environ 150.000 qx) n'a pas augmenté dans les mêmes proportions ; il faut donc aujourd'hui que l'Algérie recherche des débouchés à l'extérieur et là entre en concurrence avec la Turquie, l'Italie, la Grèce et l'Espagne. A ce stade, si l'Algérie veut gagner la partie, deux facteurs sont à améliorer : celui de la qualité et celui du prix de revient.