les feuillets d'El-Djezaïr
Henri Klein

La Porte d'Azoun et ses abords
La porte Bab-Azoun et ses abords

pages mises sur site le 26-1-2009

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La Porte d'Azoun et ses abords

La Porte d'Azoun, bien que s'éclairant au souvenir du geste audacieux du chevalier Savignac, demeure en l'Histoire d'aspect plutôt sombre, avec les odieux appareils de mort parant ses murailles qui, tant de fois, virent l'agonie affreuse de tant de malheureux que la justice turque avait condamnés à mourir sur ses crochets de fer.

Plusieurs ont décrit les supplices divers imaginés par les Barbaresques. M. de Rocqueville qui, en 1675, vit à l'oeuvre les bourreaux des Pachas, et fit connaître leurs différents modes d'opérer, s'exprime ainsi au sujet des exécuteurs des ganches.

"...Il y en a, dit-il, qui engancent. Ils ont un fer long de trois pieds qui est fixé à la muraille, pointu comme une épée. Ils attachent un homme, pieds et mains ensemble, et le laissent tomber sur ce crochet, de sept ou huit pieds de haut, et s'il s'accroche par le pied, le bras ou le côté, il demeure en cet état jusqu'à ce qu'il soit mort."

Beaucoup de ces malheureux ne mouraient qu'au bout du quatrième ou du cinquième jour, de douleur et de faim, ou d'un accès de rage.

Pendant des années, quelques-uns de ces terribles crochets furent conservés à l'Archevêché. Que sont-ils devenus...?
Il subsistait un peu partout à Alger, dans les premiers temps de l'occupation, des traces des exécutions turques.

En 1842, on voyait encore, à l'auvent de la porte de la Casbah, des clous et des cordes qui avaient servi à la pendaison d'esclaves chrétiens (Bavoux).

-- Ce supplice de la corde, les murailles de Bab-Azoun, le virent également. Bolle, en les décrivant, nous renseigne sur ce genre d'exécution.

"La Porte Bab-Azoun, dit-il, est ouverte dans une longue muraille, qui s'étend de chaque côté, et dans laquelle sont percés, en guise de fenêtres, un grand nombre de trous grillés."

"A l'heure dite, on faisait sortir de ces ouvertures une corde arrêtée par un bâton en travers. Les patients étaient conduits sur la terrasse supérieure. On leur passait la corde au cou; ils étaient aussitôt précipités et pendaient le long de la muraille où leurs cadavres demeuraient jusqu'à ce qu'ils se détachent d'eux-mêmes."

L'auteur ajoute

"Souvent la garniture des fenêtres était au complet..."
- En outre de ses cadavres, la sortie d'Azoun comportait encore des amas des plus nauséabonds, lesquels résultaient de la vie quotidienne.

- Sur la gauche, le long des falaises, étaient accumulés des amoncellements d'ordures, comme à Bab-el-Oued. La chose était d'une durée pluriséculaire.

- Ajoutons qu'on trouva, en 1830, près de la porte d'Azoun, un monticule formé de plus de 400 crânes humains, recouverts de chaux. Les pluies avaient mis à nu une partie de ces têtes qui étaient celles d'indigènes, rebelles à l'impôt, qu'on avait décapités en leurs tribus (Hatin).

Autre physionomie du lieu qu'on se plut à signaler, celle-ci, simplement originale : sur un point, les abords de la porte d'Azoun présentaient aux premières années de l'occupation un aspect particulièrement pittoresque, avec les nombreux animaux de bât et de trait qui s'y pressaient journellement. Nous reproduisons, à ce sujet, un arrêté publié en 1835, que l'Administration fit traduire en arabe et afficher sur les murs d'Alger:

ARRÊTÉ

Nous, Lieutenant Général, Pair de France, Gouverneur Général des possessions françaises dans le Nord de l'Afrique,

Vu la délibération du 8 février dernier par laquelle le Conseil Municipal de la ville d'Alger a voté la perception d'un droit d'attache sur les bêtes de somme qui stationnent à l'entrée de la ville, sur les glacis du faubourg Bab-Azoun,

Vu les articles, etc...

Arrêtons ce qui suit :

Art. 1er - A partir du 1 mars prochain, il sera perçu un droit d'attache sur les bêtes de somme qui stationnent à l'entrée de la ville, sur les glacis du faubourg Bab-Azoun, ou qui stationnent sur tout autre emplacement ultérieurement désigné par le Conseil Municipal. Ce droit est fixé à 10 centimes par jour, à raison de deux mètres carrés de terrain occupé par chaque bête de somme.

Les voitures de louage qui font le service des environs de la ville paieront au prorata du droit sus-mentionné.

Art. 2. - L'intendant civil des Possessions françaises dans le Nord de l'Afrique est chargé de l'exécution du présent arrêté.

           Alger, le 23 février 1835.

D. Comte D'ERLON.

           Pour le Gouverneur :
Le Secrétaire du Gouvernement,
           VALLET-CHEVIGNY.

- Hors de la porte d'Azoun se trouvaient deux casernes de cavalerie, des tanneries, voisines des fossés, des fabriques de pipes, des ateliers de maréchaux-ferrants, des boutiques de marchands de fruits, de légumes, de viande, des magasins de poterie et surtout des installations de vanniers occupant une butte qui s'élevait sur l'emplacement du square d'aujourd'hui.

C'était près de cet endroit que l'on procédait aux exécutions capitales. La justice française faisait, au préalable, exposer là, les criminels.