Les îles du littoral algérien - partie 2
Jean Gueydan

sur site le 12-12-2010

extraits du numéro 110 juin 2005, de "l'Algérianiste", bulletin d'idées et d'information, avec l'autorisation de la direction actuelle de la revue "l'Algérianiste"

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Les îles du littoral algérien - partie 2
Jean Gueydan

À part El-Djezaïr que tout le monde connaît, je doute fort que, même parmi les membres du Cercle " djezaïriste " (ce qui signifie le Cercle des îles), quelqu'un puisse citer beaucoup d'îles sur le littoral méditerranéen de l'Algérie. Je vais donc les énumérer en parcourant ce littoral d'est en ouest, c'est-à-dire depuis la frontière de la Tunisie (dont la dernière île est celle de Tabarka, la bénie, mot phénicien), jusqu'à la frontière du Maroc (dont les premières îles sont les trois Zaffarines, celles où souffle le zéphyr, mot grec).

Les îles du littoral algérien


El-Djezaïr :
(16000 El-Djezaïr - Alger).

Le nom phénicien était Ikosim qu'on traduit en général par " îles des épines "; certains auteurs récents proposent les " îles des hiboux ". Les Romains ont prononcé et écrit Icosium.

La ville, tombée en ruines, a été reconstruite au xe siècle, sous le nom de Djezaïr Beni Mezrana. Les îles des Beni Mezrana, où une tribu berbère s'était réfugiée lors des invasions arabes, prirent plus tard le nom d'ElDjezaïr (les îles). Il y en avait quatre principales, à part une quinzaine d'îlots ou rochers qui ont été recouverts en 1529 par une jetée que Kheireddine Barberousse avait fait construire en forme de " T " dont le pied touchait terre et dont la barre correspondait aux quatre grandes îles. Un phare était construit au milieu de cette barre sur la plus grande des îles, l'îlot Stofila nommé le Perion (Rocher). Une île a subsisté au sud du port, l'île d'El Djefna; elle sera englobée dans le grand port qui sera construit à l'époque française et sera reliée à la terre en 1912.

En 1540, les Espagnols prononçaient Argel et, en 1830 les Français l'appelaient Algère. En 1858, Alger aurait pu devenir Napoléonville mais le projet est resté sans suite.

À l'époque coloniale, on disait souvent Alger la Blanche, ce qui n'était pas très original car Tunis la Blanche portait ce surnom depuis au moins la fin du Ter siècle et " Casa Branca - Casa Blanca " (Maison Blanche), portait ce nom depuis sa fondation par les Portugais en 1515 sans parler de l'aéroport de Dar el Beida (maison blanche).

Depuis l'indépendance, El-Djezaïr a été rétabli mais Alger reste la traduction officielle de la langue française, tout comme Londres pour London.

Îlots d'EI-Kettani:
(16019 Alger - El-Kettani).

A 400 m au nord-ouest des îlots, à la limite de la vieille ville et avant le quartier récent de Bab-el-Oued, une quinzaine de gros rochers sans nom bordent la Pointe El-Kettani. Ces îlots ont d'ailleurs donné leur nom à la ville.
On trouve d'autres rochers analogues jusqu'à Saint-Eugène.

Rochers de la Pointe Pescade :
(
16 080 Ras Hamidou - ex- Pointe Pescade - wilaya d'Alger).

Quatre îlots rocheux sans nom se trouvent de part et d'autre de la Pointe. Le nom vient de l'espagnol pescado (poisson). Le nom arabe était Mers ed Debban (le Port aux Mouches).

Îlot d'Aïn-Benian:
(Aïn-Benian - ex-Guyotville - code postal oublié dans l'annuaire officiel - wilaya d'Alger ou de Tipaza).

Un lieu-dit nommé L'îlot. Peut-être est-il aujourd'hui rattaché à la terre?

Îles de Sidi-Ferruch:
(Sidi-Fredj - ex-Sidi-Ferruch - code postal oublié dans l'annuaire officiel - wilaya d'Alger ou de Tipaza).

Cinq petits îlots plats accompagnent la presqu'île de Sidi-Ferruch. Le premier, au nord-est, est si près du rivage qu'on peut (dit-on) y sauter sans se mouiller les pieds. Quatre autres îlots sont situés au sud-ouest, deux tout près du rivage et deux plus loin. Dans des temps très anciens, le promontoire sablonneux de 2 km de long et de 500 m de large, n'existait pas et le socle rocheux qui en est aujourd'hui l'extrémité était une île. À l'époque romaine son nom était Obori, ensuite les Arabes ont choisi Sidi-Fredj, et les Français prononçaient Sidi-Ferruch. Les troupes françaises ont débarqué sur ce promontoire le 14 juin 1830.

Îles de Tipaza :
(42 000 Tipaza - ex-Tipasa).

Deux îlots sont situés à faible distance au large du Koudiat Zarour (promontoire de Sainte Salsa) à l'est du port, et deux autres au large du Ras elAïch (promontoire du Forum) à l'ouest du port. Aucun n'a de nom.

Île Beringel :
(42 000 Chenoua-Plage - wilaya de Tipaza).

A 250 m de l'extrémité nord du Djebel Chenoua, l'île Beringel, autrefois Berinshel, est un rocher de 20 m de hauteur dont l'accès est difficile. Son sommet est couvert de végétation.

Les Trois Îlots :
(42 000 Chenoua-Plage ou 42 100 Cherchell - wilaya de Tipaza).

Les Trois îlots se trouvent à faible distance de la côte, au lieu-dit Rocher Blanc, à l'ouest du Djebel Chenoua, quelques kilomètres à l'est de Cherchel.

Île Joinville :
(42100 Cherchell - ex-Cherchel - wilaya de Tipaza).

L'île Joinville, d'environ 200 m sur 100 et à 150 m du rivage, est devenue une presqu'île depuis la construction de la digue qui a créé le port de Cherchel. Un phare habitable y a été construit. À l'époque phénicienne, l'île portait le nom de I-01 (l'île divine ou l'île du dieu 01). Le cap Zizerin, à l'est de Cherchel, est entouré d'un grand nombre de petits rochers dont certains peuvent être qualifiés d'îlots.

Îlot Tokikt Inndich :
(42135 Gouraya - wilaya de Tipaza).

A l'ouest de Gouraya, à 4 km au large du cap Larès, une petite île de 2 m de hauteur et de couleur noire porte deux noms : îlot Tokikt Inndich, nom inhabituel d'origine et de sens inconnu; Dzirt el-Acheuk (l'île des Amants) dont la légende rapporte que deux amants vinrent s'y cacher et y finir leur existence. On voit mal cependant comment on pouvait se cacher et vivre sur ce minuscule îlot.
Il convient d'éviter une confusion avec le Kef el-Araïs (le rocher des Nouveaux Mariés) situé à proximité, sur le continent, mais que de loin, on prend souvent pour une île, et que certains géographes anciens ont nommé ile Okour. On dit qu'il y aurait eu quatre îlots aux environs de Gouraya. Peut-être s'agit-il des quatre noms qui précèdent...

Îlot Si Djilali :
(02240 Beni Haoua - wilaya du Chief).

Cet îlot est actuellement relié à la plage de Beni Haoua par une passerelle en ciment armé et constitue un port d'embarquement de minerais. Son nom ancien est inconnu.

Îlots de Ténès:
(02200 Ténès - wilaya du Chlef).

Un massif d'îlots vers le nord-est, à 600 m du rivage, sert d'appui depuis un siècle à la plus grande des jetées qui abrite le port de Ténès. Un peu plus loin vers l'ouest, se trouve un petit îlot très près du rivage.

Île Colombi :
(02 255 El Marsa - wilaya du Chlef).

Cette île est un rocher de 33 m de hauteur et d'une cinquantaine de mètres de diamètre, à 800 m du rivage ; des milliers de pigeons y vivent. Elle a été nommée Sour el Hamam (le Rocher des Pigeons), puis île Colombi (colombe) ou Île Palomas (palombe). Elle est désormais l'île Nadji. Peut-être est- ce cette île que les Grecs avaient nommé Samathos...

Îlots du Cap Carbon (d'Arzew):
(31 200 Arzew - wilaya d'Oran).

D'Arzew au Cap Carbon, le rivage est parsemé d'un grand nombre de rochers. Deux ont une certaine importance :
L'îlot d'Arzew, au point le plus oriental de la côte, est surmonté d'un phare. Il semble s'identifier à l'île Tugisme, île fantôme qui se trouve, dit-on, entre Mostaganem et la baie d'Arzew et qui serait un rocher nu et plat, très voisin de la plage.
Un autre îlot sans nom est situé au nord du précédent.

Seba Faraoun :
(31 261 Kristel - wilaya d'Oran).

Le nom est arabe et signifie " Le Pouce du Pharaon ". Il s'agit d'un îlot pyramidal de 54 m d'altitude qu'on a voulu comparer au pouce levé d'un pharaon; il est aussi nommé " L'Aiguille " et, de loin, ressemble à un bateau à voile. Il n'est pas habitable mais constitue un abri contre les vents d'ouest.

Îlots du Cap Falcon :
(31 300 Aïn Turk - ex-Aïn-el-Turck - wilaya d'Oran).

Deux îlots sont situés près du rivage, au large du hameau Falcon, près du cap du même nom.

Île Plan.. :
(31 330 Les Andalouses - wilaya d'Oran).

L'île Plane est située à 7 km au large des Andalouses. Contrairement à ce que son nom laisserait supposer, son relief est très tourmenté. Son diamètre est de 200 à 300 m et sa hauteur de 18 m. Elle possède quelque végétation et un très grand nombre d'éperviers y vivent. Un phare y a été construit. Les Grecs l'ont nommée Planès nèsos (l'île de l'erreur), que les Romains ont traduit par Erroris insula. Elle est entourée d'un grand nombre de petits rochers.

Île de Mersa Madakh :
(31 171 Sidi Bakhti - wilaya d'Oran ou 46 110 El Amria - ex-Lourmel, wilaya d'Aïn-Témouchent).

C'était autrefois une île. C'est aujourd'hui une presqu'île à l'embouchure de l'Oued Madakh, ex-Oued Atchane, dans une crique difficilement accessible par terre, à 5 km au sud-ouest du Cap Sigale, alias Cap Blanc. Cette crique est divisée en deux par la presqu'île : baie de Mersa Madakh proprement dite, et baie de Mersa Ali ben Nour. La flore et la faune sont celles du continent. Des Phéniciens ont vécu à cet emplacement du ve au üie siècle avant Jésus-Christ. Les Romains y ont créé la ville de Gilva qui a, elle aussi, été abandonnée par la suite. La presqu'île est flanquée de quatre îlots disposés en carré et proches du rivage. Un autre îlot plus grand est situé à 2 km au nord, près du rivage.

Îles Habibas :
(31 171 Sidi Bakhti - wilaya d'Oran).

Ces îles se trouvent à une dizaine de kilomètres au nord-ouest du Cap Sigale; leur sol est salé et interdit toute végétation. Elles sont entourées d'un grand nombre de petits rochers. La plus grande est l'île Touria (du phénicien t'sor : rocher) que les Grecs ont compris île Tauria (du grec tauros: taureau). Elle mesure 1200 m de longueur sur 160 à 600 m de largeur et 103 m de hauteur. Son rivage est escarpé mais elle possède un bon mouillage pour les petits bateaux. Un phare y a été construit. On y a trouvé de nombreux vestiges phéniciens. La seconde île, beaucoup plus petite, se trouve au nord-est de la première.

Îlot du Cap Figalo :
(46110 Bou Zedjar - wilaya d'Aïn-Témouchent).

Un îlot sans nom est situé près du rivage à 1,5 km au sud du Cap Figalo.

Le Pain de Sucre :
(46300 Béni-Saf - wilaya d'Aïn-Témouchent).

Un îlot sans nom est situé près du rivage à 1,2 km au sud de Béni-Saf. Le Pain de Sucre est un gros rocher situé également près du rivage à 2,5 km à l'ouest de la même ville.

Île Rachgoun :
(46300 Rachgoun - wilaya d'Aïn-Témouchent).

Cette île est située à 2 km du rivage dans l'axe de l'embouchure de l'oued Tafna. Un phare y a été construit. Elle a porté le nom de Insula Acra, insula étant latin et ocra grec. Elle a ensuite été nommée Archgoul et Harchgoun, dont nous avons fait Rachgoun. Elle mesure 800 de long, 200 m de large et 60 m de haut. Un excellent débarcadère existe au sud-ouest et les Phéniciens l'ont longtemps utilisé. Ultérieurement, un port a été construit sur le continent, le Portus Sigensis, et il desservait notamment la ville de Siga, capitale des rois maurétaniens.
Deux petites îles Siga sont situées près du continent à 1 km à l'ouest de l'embouchure de la Tafna. Deux îlots sans nom se trouvent dans une crique à 4 km plus à l'ouest.

Île Mokreum :
(13580 Honaïne - wilaya de Tlemcen).

Cette île de 400 m de longueur se trouve au nord du port minier d'Honaïne. Un îlot est situé à l'est, un autre au sud et trois autres encore plus au sud; tous sont petits et près du rivage.

Ad Fratres :
(13400 Ghazaouet - ex- Nemours - wilaya de Tlemcen).

Les " Deux Frères " sont deux rochers qui émergent à 300 m de la plage de Nemours.Îlots du Cap Milonia : (13440 Marsa ben M'hidi - wilaya de Tlemcen).Trois petits îlots se trouvent à l'est de ce cap et un autre à l'ouest.
Ad Fratres.

En guise de conclusion

Les trois quarts des îles énumérées sont d'énormes rochers qui surgissent hors de l'eau sans un brin d'herbe, ou bien des groupes de rochers tout aussi arides et dont le seul intérêt est de servir parfois d'assise à des jetées. Seul le dernier quart rassemble des îles avec de la terre végétale.

Parmi ce dernier quart, la moitié sont des " quasi-presqu'îles " assimilables au continent, un quart inhabitable, sauf pour les oiseaux. Il reste par conséquent le quart du quart pour aller jouer les Robinsons pendant un week- end pas plus, à la condition qu'il fasse beau et avec un sac à dos bien garni. Toutes ces îles algériennes sont petites. Aucune ne dépasse 1 200 m dans sa plus grande dimension, ni 150 m de hauteur. C'est dire qu'elles comptent peu et sont mal connues. Les cartes et les guides sont souvent inexacts, en oublient la moitié ou, ce qui est pire, les indiquent parfois à côté de leur véritable emplacement.

Voilà pourquoi j'ai voulu en dresser l'inventaire, quitte à commettre quelques erreurs, puisqu'il serait aujourd'hui bien difficile d'aller compléter sur place " mes souvenirs " déjà lointains de l'Algérie heureuse...