le jardin d'essai - Alger, le Hamma
1.-Ecole ménagère agricole
sur site le 11-9-2011
2.-
L'ÉCOLE D'ENSEIGNEMENT MÉNAGER AGRICOLE
DU JARDIN-D'ESSAI DU HAMMA
Afrique illustrée du 21-2-1920 - Transmis par Francis Rambert
fév.2021

L'enseignement ménager agricole est d'origine essentiellement française et, s'il commence à peine à être largement et rationnellement organisé chez nous ce n'est, certes, pas faute d'avoir eu d'illustres précurseurs !

Faut-il citer le distique bien connu qu'Olivier de Serres inscrivait dans son Théâtre d'agriculture et mesnage des champs :
" On dict bien vrai, qu'en chacune saison, " La femme fait ou défait la maison. "

Faut-il évoquer, en des temps plus rapprochés, le souvenir de l'agronome français Pierre Joigneaux qui exposa dans son ouvrage Conseils à la jeune fermière, publié à Bruxelles en 1859, sa conception de l'enseignement ménager agricole en ces quelques lignes frappées: au coin de la plus robuste logique et inspirées par une claire vision du rôle de la femme à la ferme : "Vous voulez, - écrivait-il - que le cultivateur sache distinguer ses terrains, raisonner ses labours, apprécier la valeur de ses engrais, le mérite de ses outils ; vous voulez qu'il se rende compte de la manière de vivre des végétaux ; fort bien. A cet effet, vous lui faites enseigner toutes sortes de bonnes choses scientifiques ; c'est toujours fort bien... Mais, pour Dieu, soyez donc conséquents et faites pour les filles ce que vous faites pour les garçons. Elles ont dans l'exploitation une large part de besogne et de responsabilité. "
C'était là, à n'en pas douter, du féminisme du meilleur aloi.

Passons maintenant aux résultats. |

La nécessité d'un enseignement spécial permettant, de donner aux futures compagnes d'agriculteurs les connaissances les mettant à même de remplir leur double rôle de ménagères et de fermières s'est fait, sentir dans tous les pays.

L'Algérie, pays essentiellement agricole, ne pouvait, s'en désintéresser. Aussi, la Commission instituée dans la Colonie par arrêté du 14 février 1914, en vue de l'étude des questions concernant l'élevage avait-t-elle tout particulièrement insisté sur la nécessité d'y organiser cet enseignement.

A la faveur de la réorganisation des services économiques de l'Algérie et, plus spécialement, de celle des services d'études, des recherches, d'expérimentation et de vulgarisation agricole - œuvre d'envergure à la réalisation de laquelle M. Brunel, directeur de l'Agriculture, et M. Chervin, sous-directeur, se sont obstinément attachés - il fut décidé que le bénéfice de l'enseignement agricole ménager serait acquis à l'Algérie par la création d'une École spécialisée, conçue sur le modèle de celles de la Métropole. Cette École ménagère serait installée au Jardin d'Essai du Hamma. Les travaux de restauration et d'aménagement que cette entreprise nécessitait ne permirent pas son fonctionnement à la rentrée d'octobre 1918, comme ont l'espérait. Elle fut donc provisoirement installée à Maison-Carrée dans les locaux de l'École d'Agriculture disponibles par suite de l'absence dès jeunes gens et elle y fonctionna durant l'année scolaire 1918,


*** La qualité médiocre des photos de cette page est celle de la revue. Nous sommes ici en 1922. Amélioration notable plus tard, dans les revues à venir. " Algeria " en particulier.
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Ecole ménagère agricole


L'ÉCOLE D'ENSEIGNEMENT MÉNAGER AGRICOLE
L'ÉCOLE D'ENSEIGNEMENT MÉNAGER AGRICOLE

L'ÉCOLE D'ENSEIGNEMENT MÉNAGER AGRICOLE
DU JARDIN-D'ESSAI DU HAMMA

L'enseignement ménager agricole est d'origine essentiellement française et, s'il commence à peine à être largement et rationnellement organisé chez nous ce n'est, certes, pas faute d'avoir eu d'illustres précurseurs !

Faut-il citer le distique bien connu qu'Olivier de Serres inscrivait dans son Théâtre d'agriculture et mesnage des champs :
" On dict bien vrai, qu'en chacune saison, " La femme fait ou défait la maison. "

Faut-il évoquer, en des temps plus rapprochés, le souvenir de l'agronome français Pierre Joigneaux qui exposa dans son ouvrage Conseils à la jeune fermière, publié à Bruxelles en 1859, sa conception de l'enseignement ménager agricole en ces quelques lignes frappées: au coin de la plus robuste logique et inspirées par une claire vision du rôle de la femme à la ferme : "Vous voulez, - écrivait-il - que le cultivateur sache distinguer ses terrains, raisonner ses labours, apprécier la valeur de ses engrais, le mérite de ses outils ; vous voulez qu'il se rende compte de la manière de vivre des végétaux ; fort bien. A cet effet, vous lui faites enseigner toutes sortes de bonnes choses scientifiques ; c'est toujours fort bien... Mais, pour Dieu, soyez donc conséquents et faites pour les filles ce que vous faites pour les garçons. Elles ont dans l'exploitation une large part de besogne et de responsabilité. "
C'était là, à n'en pas douter, du féminisme du meilleur aloi.

Passons maintenant aux résultats. |

La nécessité d'un enseignement spécial permettant, de donner aux futures compagnes d'agriculteurs les connaissances les mettant à même de remplir leur double rôle de ménagères et de fermières s'est fait, sentir dans tous les pays.

L'Algérie, pays essentiellement agricole, ne pouvait, s'en désintéresser. Aussi, la Commission instituée dans la Colonie par arrêté du 14 février 1914, en vue de l'étude des questions concernant l'élevage avait-t-elle tout particulièrement insisté sur la nécessité d'y organiser cet enseignement.

A la faveur de la réorganisation des services économiques de l'Algérie et, plus spécialement, de celle des services d'études, des recherches, d'expérimentation et de vulgarisation agricole - œuvre d'envergure à la réalisation de laquelle M. Brunel, directeur de l'Agriculture, et M. Chervin, sous-directeur, se sont obstinément attachés - il fut décidé que le bénéfice de l'enseignement agricole ménager serait acquis à l'Algérie par la création d'une École spécialisée, conçue sur le modèle de celles de la Métropole. Cette École ménagère serait installée au Jardin d'Essai du Hamma. Les travaux de restauration et d'aménagement que cette entreprise nécessitait ne permirent pas son fonctionnement à la rentrée d'octobre 1918, comme ont l'espérait. Elle fut donc provisoirement installée à Maison-Carrée dans les locaux de l'École d'Agriculture disponibles par suite de l'absence dès jeunes gens et elle y fonctionna durant l'année scolaire 1918,

Enfin, à la rentrée d'octobre 1919, l'École d'Agriculture rouvrit ses. portes et ses locaux à ses élèves, et comme, d'autre part, la mise en état du bâtiment principal du Jardin d'Essai et de ses communs destinés à recevoir l'École ménagère étaient prêts, cette dernière put se mettre " dans ses meubles ".
Mlle Quintin, qui assura pendant plusieurs années le fonctionnement d'Écoles ménagères en France, dirige très habilement l'École, admirablement secondée par un professeur,, Mlle Bernard, également diplômée de Grignon.

Et ce n'est pas petite tâche que celle qui leur est dévolue !

L'École d'Enseignement ménager agricole, nous est-il exposé, comporte deux sections : la première comprenant les jeunes filles désirant acquérir une solide instruction ménagère et agricole et se préparer à leur rôle de femmes d'agriculteurs ; la seconde, composée de personnes (élèves maîtresses ou institutrices notamment) désireuses de compléter leurs connaissances en vue de pouvoir donner ensuite un enseignement ménager agricole dans les écoles de filles relevant de l'autorité académique (enseignement scolaire ou post-scolaire) ou dans les écoles ambulantes dont la Direction de l'Agriculture compte proposer l'organisation dès qu'elle disposera des.éléments indispensables.

L'Afrique du Nord illustrée, fidèle à son programme, n'a pas manqué d'aller se rendre compte " de visu " et " de auditu " - car la plus aimable, et la plus documentée des interviews lui fut accordée - de ce qu'est l'École d'enseignement agricole ménager. Elle se hâte d'en faire part à ses lecteurs.

Le nouvel établissement a pris possession du bâtiment central du Jardin, face à l'Institut Pasteur, mais de l'autre côté de la rue de Lyon.

L'École ménagère agricole peut être considérée comme une grande famille dans laquelle chaque membre a sa part du travail quotidien.

En principe, les travaux pratiques absorbent toutes les matinées. Les après-midi sont consacrés aux cours théoriques, aux conférences et aux séances d'application.

Chaque promotion est scindée en trois sections d'égale importance ; les élèves qui composent chacune d'elles sont occupées durant une semaine aux mêmes travaux. C'est ainsi que l'on distingue les sections respectives de cuisine, de ménage et de travaux de la ferme.

L'enseignement théorique comporte des conférences faites par le personnel de l'École et par des professeurs spécialistes portant sur toutes les matières de l'enseignement auxquelles s'ajoutent l'agriculture générale, les soins,à donner aux animaux de la ferme, le jardinage, l'apiculture, l'hygiène, la puériculture, etc.

Sous la direction du jardinier en chef du Jardin d'Essai, les élèves de l'École sèment, piochent, taillent, greffent. De même, au rucher, elles participent à toutes les opérations apicoles : visite des ruches, soins aux abeilles, récolte du miel.

Enfin, des conférences extrêmement goûtées leur sont faites à l'Institut Pasteur sur les maladies épidémiques, sur la prophylaxie du paludisme notamment.. Des visites aux établissements intéressants des environs (frigorifique de Maison-Carrée, laverie de laines d'Hussein-Dey) complètent cet enseignement si vivant. ...

L'École dispose d'un internat meublé simplement, mais avec goût, et où l'air et la lumière pénètrent largement.

Le dortoir, vaste, est doté de cellules individuelles coquettement aménagées.

Les locaux d'enseignement, distribués au rez-déchaussée, comprennent une salle de cours, une cuisine et un office remarquablement installés.. À côté, une buanderie, des salles de travaux pratiques de couture, de blanchissage et de repassage, pourvues de tout le matériel nécessaire. Une salle de lecture-bibliothèque vient ensuite. Enfin, voici une salle de récréation où un piano, maintenant sagement recouvert de sa housse, permet aux élèves, en fin de journée, de plaquer quelques accords qui leur fait oublier, pour quelques instants, le réalisme des travaux de la journée.

La ferme est dotée d'une étable où six magnifiques vaches fournissent le lait qui sera traité dans la laiterie voisine.

Cette dernière, parfaitement agencée, est munie d'un outillage des plus modernes : écrémeuses, barattes, malaxeurs, presses et moules à fromages, petit laboratoire d'analyse du lait. Inexpérimentées au début, les élèves, nous assure-t-on, réussissent à souhait, au bout de quelques essais, la fabrication du beurre et de certains fromages.

La basse-cour est nombreuse et bruyante. Un matériel d'élevage complet y existe : couveuses, éleveuses artificielles, gaveuses, etc.

A ce propos, il est intéressant d'insister sur le développement que doit prendre l'aviculture à l'École ménagère agricole. Des travaux en cours d'exécution la doteront d'un parc d'aviculture modèle où seront représentées les différentes races de poules françaises et étrangères, susceptibles d'améliorer les races indigènes. Les nombreuses demandes adressées à l'École en vue de l'achat d'œufs et de reproducteurs sélectionnés laissent entrevoir déjà le rôle intéressant que pourra jouer cet établissement dans le domaine de l'aviculture. Ainsi va se trouver réalisé le vœu émis au congrès de l'élevage, en 1914, " tendant à obtenir que les femmes et filles de colons soient instruites de l'élevage de la volaille qui leur revient plus particulièrement à la ferme. "

A signaler aussi que l'extériorisation de l'activité de l'École s'étendra, sous peu, à la création d'une série de cours relatifs à la fabrication des conserves, auxquels pourront assister les personnes que la question ne laisse pas indifférentes.

Telle est l'École d'enseignement agricole ménager, située, ce qui ne gâte rien, dans le cadre le plus riant qui soit et où le travail devient un plaisir.
Les buts que.l'on s'est proposé en la créant sont-ils atteints ? Il est prématuré de juger cette œuvre qui, en réalité, peut à peine commencer à fonctionner dans de bonnes conditions matérielles.

Les élèves-maîtresses qui se sont succédé à l'École, en stage d'études pratiques d'une durée de trois mois à peine, ont toutes fait preuve d'entrain, de volonté attentive. Il ne saurait être question de faire d'elles des " fermières accomplies ". Leur faire comprendre, au cours d'un aperçu rapide des travaux de ménage et de la ferme, l'importance insoupçonnée du rôle que la femme doit tenir à la campagne était, semble-t'-il, le but visé. Nous sommes persuadé qu'il a été largement atteint.

Mais il reste à l'École " instituée pour recevoir .simultanément des jeunes filles de colons désireuses d'acquérir une éducation; ménagère et agricole et des personnes appelées a donner ultérieurement l'enseignement ménager dans les écoles de filles de la Colonie ", à remplir la première partie de ce programme.
Il est sélect, " up to date ", en Angleterre, d'envoyer les jeunes filles de la bourgeoisie agricole - voire même les riches héritières de la campagne - se préparer à leur métier d'" agricultrices " et à leur futur rôle de compagnes de gentlemen-farmer, dans les collèges agricoles féminins de Studley, Swanley, Reading, etc.

Ce mouvement, commencé dès avant la guerre, s'accentue de plus en plus.

Ce que le sens pratique et la mode ont pu faire on Angleterre - et dans d'autres pays (Belgique, Allemagne, Hollande), la nécessité de la restauration agricole de notre pays, qui exige une collaboration avisée et intelligente, entre le cultivateur et sa compagne, saura, nous en sommes certains, le réaliser chez nous.