le lycée Gautier
Alger, rue Hoche

Anecdotes diverses

mise sur site le 10-10-2007

6 Ko / s
retour
 
19-10-2007
Brave Monsieur MEUNIER !

Ce professeur, qui a remplacé l'ineffable M. DOURSON, spécialiste des dictées musicales aux élèves de 6ème, s'est tout de suite imposé à nous, pauvres gamins pas encore mélomanes (ni même mélowoman, puisque le lycée n'était pas mixte !) en voulant faire de nous des virtuoses du chant, d'excellents choristes avant le film de Jugnot (qui, entre parenthèses a copié un ancien film en noir et blanc intitulé " la cage aux rossignols " : seule la fin diffère puisque dans l'ancien film, le prof épouse la mère du soliste !), des chanteurs généreux, impétueux et rivaux des petits chanteurs à la croix de bois, en un mot des musiciens talentueux. C'est beau l'ambition, mais c'est mal compter sur les élèves !

Il avait inscrit tous ses élèves au concours de chants de l' " UFOLEA " (Union française des œuvres laïques des écoles d'Algérie, ou quelque chose comme ça). Pour ce faire, il nous avait choisi deux œuvres : 1 " negro spiritual ". C'était sans doute l'épreuve imposée. Jusque là, tout allait bien, nous étions partants. Ainsi, malheureusement, qu'une œuvre de sa composition intitulée (je m'en souviendrais jusqu'à mon dernier jour ) " le pingouin ". C'était là, vraisemblablement, l'épreuve libre.

Autant la première œuvre nous paraissait digne d'être chantée (en groupe, s'entend), autant la seconde (qui est restée dans les annales de l'art lyrique français !) nous semblait insipide, incolore, avec une musique " gnangnan " et des paroles mièvres sinon stupides ! Le comble était en outre que, n'ayant pas de partition à sa disposition pour la première œuvre (question de sous, sans doute, les photocopieurs n'existant pas à l'époque), M. Meunier nous en avait dicté les paroles et voulait que nous en restituions la musique à l'oreille. Le malheur (pour lui, car nous, au contraire, nous jubilions !) est qu'il ne connaissait pas une brème d'anglais (fallait le faire pour un " negro spiritual "!) Or, nous, très espiègles, feignions de ne pas toujours comprendre ce qu'il dictait (il prononçait les mots comme si c'était du français et il nous demandait si c'était bien ainsi qu'il fallait prononcer !). Le résultat en fut édifiant : la plupart des mots étaient complètement changés en mots à peu près consonants mais qui n'entraient pas dans le contexte et la chanson ne voulait plus rien dire. Un exemple ? Le début de la chanson m'est restée en mémoire :


"Oooh ! The blind man
Stood on the road
And cried !
On the road and criiiieeed…"
Cela s'est traduit ainsi:
" Bof ! ze blink man
Stooge on ze root
And crowd ! etc..." (anglicistes, à vos Harrap's).

Evidemment, il prononçait " rout (comme route) au lieu de " raude " et " cried ", il ne savait pas le prononcer. Nous l'avons aidé !

Quant à la seconde chanson, dans laquelle il était question d'un oiseau palmipède de la famille des alcidés qui se pelait la nouille sur la banquise, du moins c'est ainsi que nous l'interprétions, je n'en ai retenu ni l'air, ni les paroles. Je gage que, parmi les rescapés de la catastrophe musicale, il ne subsiste pas un seul élève qui se les rappelle ! Maintenant que j'ai vu " La marche de l'empereur " je m'aperçois qu'il était plutôt question d'un manchot, puisqu'il marchait en se dandinant sur la banquise ! Même là, il avait tout faux le brave Meunier !

Nous voilà donc, en classe de musique, en train d'anonner ces immortelles envolées lyriques à longueur de semaine.

Au bout de plusieurs séances hebdomadaires, et comme le résultat était bien en-deçà de ses propres espérances et ambitions, il eut le grand courage de se séparer des " moins bons éléments " (qui devaient partir en salle de permanence, d'où toutes les ficelles pour taper cao, déjà en 5ème, n'est-ce pas Françon ?) en opérant lui-même une sélection. Nous sommes donc passés individuellement sous sa houlette (ah ! le bon pasteur !), devant lui et nous dûmes, après le sempiternel : " Donnez-moi le la ! ", nous efforcer de faire quelques vocalises. Ces " la " là, cette gamme de " la ", devrais-je dire, était étonnamment étoffée et, sur trente et quelques élèves auditionnés, nous pouvions entendre, à la grande stupeur plus que désappointement du professeur, une douzaine bien comptée de sons (puisqu'il est difficile de qualifier autrement les bruits qui sortaient des gosiers juvéniles et qui étaient censés être des " la ") allant de la note cristalline et à peine perceptible d'un verre à boire (plein) heurté par un maillet de bois à l'harmonieux coassement du crapaud enroué, en passant par la voix de fausset d'un camarade époumoné à force de se croire obligé de prolonger son " la " ou par une râpe à fromage frottant ses mailles de fer blanc sur un pupitre de chêne !

Bref, il en élimina la moitié et garda l'autre moitié sans se douter que les meilleurs éléments, selon ses critères, étaient presque tous éliminés, à croire que les " forts en thème ", plus consciencieux, n'étaient pas forts en tout ! Parmi les heureux élus, figuraient, outre votre serviteur (pourtant fort en thème, moins en français), une dizaine de garnements restés dans le dernier carré pour ne pas subir l'humiliation d'une heure de salle de permanence entre deux cours, mais peu enclins à rivaliser avec un Gilbert Bécaud qui venait de passer à Alger un tour de chant mémorable (condoléances attristées à M. le piano !).
M. Meunier nous fit alors répéter inlassablement son " pingouin " et notre " Bof ! Ze blink man… "

A l'approche du concours, M. Meunier était de plus en plus dé…concerté (le concert, pourtant, il devait connaître !) : " Je ne comprends pas, ça part bien au début, à l'unisson, mais par la suite ça dérape et j'entends comme des sons discordants par là ! Ça manque d'émotion !" dit-il à l'intention de notre petit groupe de faux maîtres chanteurs, tout auréolés d'innocence, au second rang de la classe.

Effectivement, lassés de ces mesures dites musicales, ennuyés plutôt qu'amusés par paroles et musique, enfin, pressés de regagner, qui la plage (nous étions déjà au mois d'avril), qui nos parcs et jardins de jeux, la huitaine de garnements ainsi interpellés s'étaient mis à chanter impunément (et juste, pour une fois !) au milieu des pingouins qui s'ébattaient sur la banquise et accompagnés du pauvre " blink man " qui se lamentait sans doute de ne pas entendre de plus douce mélodie ! :

" Meunier, tu dors,
Ton moulin, ton moulin
Va trop vite etc. "

Pauvre M. Meunier, il n'a jamais compris pourquoi il n'arrivait pas à nous faire chanter d'une seule et belle voix !

Son concours, il l'a tout de même passé, et avec les élèves sélectionnés par lui. Et nous avons chanté mais, malgré notre intention de faire notre maximum, seulement au moment précis de l'épreuve pour ne pas faire perdre la face à notre professeur, nous n'avions pas réussi à être meilleurs qu'en classe. Et, qui l'eût cru, nous n'avons pas gagné ! Comble de tristesse, M. Meunier n'a jamais voulu nous communiquer le résultat final du concours, nous nous demandons encore pourquoi.

En classe de 4ème, nous avions été dispensés de cours de musique, vraisemblablement pour nous récompenser de notre bonne volonté de l'année précédente.

Daniel Kannengiesser

10-10-2007
En classe de troisième, nous n' avions pas de terrain d' éducation physique; nous évoluions alors en salle de gymnastique, vieille, puante et peu avenante. Nous n' étions que 7 ou 8 à "bricoler" quelques mouvements prétendus de gymnastique ou bien nous pompions les devoirs qui auraient dû être faits à la maison ! Ce qui fait qu' à la fin de l' année les "profs de gym" étaient bien ennuyés pour donner leur palmarès (1er prix, 2ème prix et accessits).
Ils nous ont alors demandé d' en choisir parmi ceux que nous pensions être les moins mauvais. Evidemment notre choix se porta sur ceux qui n' étaient jamais présents !
C' est ainsi que RODRIGUEZ (qui figure sur la photo) est devenu 1er prix de gymnastique devant CARDONA !
( Daniel Kannengiesser)