CENTRE DART ET D'HISTOIRE
LE MUSÉE NATIONAL DES BEAUX-ARTS DALGER
S'AFFIRME AUJOURD'HUI DUNE PORTÉE EUROPÉENNE
Quelques uns de nos concitoyens
qui hantent les « salons » et les expositions particulières,
au risque de se trouver en présence de « navets »,
semblent oublier qu'ils ont à leur disposition, toute lannée,
une collection de toiles et de sculptures d'une grande beauté,
parmi lesquelles on compte des chefs-d'uvre indiscutables du passé
et du présent
Je fais allusion à notre musée national des Beaux-Arts,
trop peu visité, hélas ! en dépit de sa proximité
du centre dAlger, de son site, admirable pour le panorama quil
offre à nos yeux, de lesthétique de son bâtiment
et de la disposition claire et aérée de ses salles.
Il na que 23 ans dâge et sest substitué,
à loccasion du Centenaire de la conquête (1930) à
un vieux musée municipal, dont lintérêt, indéniable
certes, était limité.
Il en a absorbé les uvres intéressantes et, pour
le reste, a été garni assez rapidement de toiles, dessins,
sculptures, acquis grâce aux subventions accordées par
le commissariat du Centenaire dabord, puis par lAssemblée
algérienne et le Gouvernement général. La direction
des Arts et des Lettres a, dautre part, contribué à
son enrichissement par des dons duvres de valeur.
Enfin, avantage important pour la continuité des efforts, il
na eu depuis sa création quun seul directeur, M.
Jean Alazard, actuellement doyen de notre Faculté des lettres,
dont lérudition et la compétence en matière
dart sont universellement reconnues et appréciées
dans le-monde savant. Grâce à lui, un plan judicieux dorganisation
a été établi, et un choix heureux a présidé
aux acquisitions, en vue de constituer une histoire abrégée
de la sculpture française, et de représenter la plupart
des écoles de peinture.
Un jeune musée devenu adulte
A la faveur de toutes ces
circonstances, ce jeune musée est devenu très rapidement
adulte et a pu remplir pleinement le rôle qui lui incombait, comme
à tout autre, cest-à-dire : refléter un des
aspects les plus séduisants de notre histoire et contribuer ainsi
au développement de la fierté nationale, sans, pour cela,
négliger lapport artistique de létranger à
la culture générale de lhumanité.
Fournir aux artistes et étudiants des Beaux-Arts, locaux ou de
passage, des sujets de méditation et des exemples. Éclairer
le goût des amateurs d'art ; affirmer la sensibilité de
tous les jeunes gens, en complétant lenseignement des écoles
et contribuer ainsi à la formation dhommes et de femmes
vraiment civilisés, pouvant sintéresser à
autre chose quà des questions matérielles.
Et son enrichissement sest pour suivi dannée en année
sauf pendant la guerre de 39-45, période pendant laquelle ses
uvres furent disséminées et camouflées dans
toute lAlgérie en des points connus de quelques initiés
seulement.
Après larmistice, il fut reconstitué et ré
inauguré par le gouverneur général qui, en accord
avec les corps élus, sest toujours intéressé
à lui (quel que soit le titulaire des fonctions gubernatoriales).
Cest, en effet, grâce à lappui financier des
Assemblée algériennes et de lAdministration centrale
quont pu être organisées, dans îe cadre du
musée, des expositions d'uvres de grande valeur, reçues
de France pour la plupart.
Le premier en date eut pour sujet : « LOrient dans la peinture
française en 1930 » : puis vinrent des présentations
des peintres Marquet, La Patellière, Maguet, Dufresne et Launois,
ces trois derniers ex pensionnaires de la villa Abd-el-Tif
Ses nombreux chefs-d'uvre créent
une ambiance européenne
Lintérêt que les hautes sphères portaient
au musée sest encore manifesté en 1951 par lédition
aux frais du Gouvernement général dune brochure
donnant la reproduction de 100 de ses chefs-duvre
(73 peintures, 27 sculptures) échelonnés entre le XVee
siècle et nos jours. Peintures de lécole franco-rhénane
du XVee siècle, de la Renaissance italienne, des écoles
françaises des XVIe
XVIIe , XVIIIe , XIXe siècles et des écoles française
et étrangère con temporaines.
Parmi les peintres représentés, on note pour le XIXe siècle
et lépoque actuelle : David, Prudhon, Gros, Ingres,
Delacroix, J.-F. Millet, Fromentin. Chassériau, Courbet. Corot
Daumier, Puvis de Chavannes, Boudin, Monet, Jonokino, Pissarro, Sisley,
Berthe Morizot, Renoir, Monticeili.
Sculptures de Barye, Dalou, Schnegg, Bourdelle, Rodin, Bernard, Maillol.
Minne, Despiau, Belmondo, Jane Poupelet. Malfray. Gargallo, Caujan,
autre pensionnaire de la villa Abd-el-Tif. mort prématurément
à lâge de 44 ans.
En mai 1953, le gouverneur général inaugurait lexposition
de 71 uvres nouvellement acquises « présentant
lintérêt indiscutable de réalisations de très
grand talent »
Elles étaient de provenances diverses (France et étranger),
et leur intégration à notre musée le faisait déborder
de son cadre national pour lui donner une ambiance européenne.
Dans tous les quotidiens dAlger (et ici-même), il été
rendu compte de cette belle manifestation dart.
Maïs il ny a pas que ces 171 chefs-duvre reconnus
tels. Toutes les réalisations exposées sont de grande
valeur et le musée est légal des meilleurs des grandes
villes de France.
Dautres noms sont venus sajouter au catalogue à ceux
des auteurs des 100 chefs-duvre, ceux notamment de Marquet,
La Patellière, Dufresne. Raoul Dufy. Matisse, Maguet, Launois,
ceux dartistes algériens vivants ou décédés.
Il est ouvert à tous les talents, « à toute forme
dart pourvu quelle soit riche denseignement »
(Jean Alazard).
Il résume notre histoire de lart (plus particulièrement
peut-être en sculpture).
Cett ainsi quil contient, outre 150 bronzes de sculpteurs
français du dix-neuvième siècle à nos jours,
une galerie de moulages réunissent les uvres caractéristiques
du moyen âge, de la Renaissance et des temps modernes.
Cest ainsi quun cabinet destampes et de dessins a
été ajouté aux salles de peinture.
Et tout cela constitue un ensemble plaisant, homogène et cohérent,
grâce au goût qui a présidé à la répartition
des locaux et à la disposition des uvres à lintérieur
de chacun deux.
Cest un musée vraiment important, très bien éclairé,
et qui mérite dêtre visité fréquemment,
pour notre plus grand profit. C est avec plaisir que japporte
à son service ma modeste contribution.