sur site le 22/12/2001
-Une voix d'or venue d'Alger

L'Algérianiste n°70
Document proposé par Hervé Cuesta

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L'Algérianiste a souvent traité des sujets nombreux et variés concernant la mémoire de la culture en Algérie française : l'Histoire (la grande et la petite, celle du souvenir personnel), la langue, les arts... A ce dernier dossier il faut ajouter celui du " Bel canto ".

Nous revoyons tous l'Opéra d'Alger qui s'ouvrait sur le square Bresson. Il serait intéressant d'en suivre - une autre fois qui sait -l'historique, puisqu'il a donné à la France des voix célèbres, entre autres celle d'Irène Jaumillot disparue en octobre 1994 à Nantes.

Irène Jaumillot était née à Alger le 16 septembre 1938 d'une mère corse et d'un père toulonnais qui était employé à la Compagnie Générale Transatlantique.

L'enfant grandit dans un milieu modeste auprès d'une mère fanatique d'opéra qui lui transmit cette pas sion. Il n'est donc pas étonnant de la retrouver au conservatoire d'Alger dans la classe de " Gino " où elle obtint le premier prix avec l'air de Marguerite du Faust de Gounod. Sa voix au médium chaud et coloré, aux aigus solides et chaleureux, son timbre qui gardait la lumière de son pays natal, son physique séduisant lui valurent la consécration dans la capitale où elle sort des classes de Pansera et Louis Noguéra, première parmi soixante-quinze candidats à vingt ans en 1958. L'air de Desdémone qu'elle interpréta lors de ce concours lui valut également le premier de nombreux prix : le prix Osiris.

Dès lors elle va voler de succès en succès plus jeune Marguerite du répertoire après la Malibran, elle ne dédaigne pas pour autant l'opérette et même les variétés, mais devient définitivement l'égale des plus grandes, Régine Crespin, Jeanne Rhodes, Montserrat Caballé. Les scènes internationales vont l'accueillir, des publics divers l'ovationner, mais l'Algérie meurtrie est toujours au fond de son cœur ; c'est les larmes aux yeux qu'elle chante l'air d'Aida : " Je ne reverrai plus mon pays ".

En quête de la musique tout autant que d'elle-même (elle découvrira en Mozart la perfection), elle n'a qu'un credo : donner le meilleur de soi au public. En 1973, elle est victime d'un très grave accident. Elle quitte la scène mais n'abandonne pas la musique.

Après des années de souffrance, elle se produit dans des récitals, fait partie de jurys où elle se révèle découvreuse de talents, s'investit dans l'association des retraités de l'Opéra, enseigne le chant au conservatoire de Nantes...

Sa voix née en Algérie et porteuse de notre nostalgie commune est toujours présente en plus de soixante enregistrements réalisés par l'O.R.TF et chez Philips.

CLAUDIA ADROVER-SENDRA
Documentation fournie par Madame Ida Doneddu, lectrice de L'Algérianiste, elle-même cantatrice, qui connut et conseilla la jeune Irène, et par le frère de l'artiste.