LA PLAINE DE LA MITIDJA AVANT 1962
RAPIDE SURVOL DES COMMUNES DE LA MITIDJA

MARENGO (ou Hadjout)

Georges Bouchet

mise sur site le 24-5-2011

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MARENGO (ou Hadjout)

MARENGO (ou Hadjout)

 

Origine du nom : italo-française. Marengo est le nom d'un village italien, le nom d'une victoire française contre les Autrichiens et le surnom d'un jeune soldat italien.
Le village est situé dans le Piémont à 70km à l'est de Turin.
La bataille de Marengo opposa le 14 juin 1800 les Français et les Autrichiens.
Le surnom de Marengo a été donné par Napoléon, le 14 juin 1807 au soir de la bataille de Friedland en Prusse orientale, à un jeune soldat italien du Piémont nommé Gaspard Cappone.
Dès lors son nom de famille fut oublié et inutilisé.
Ce soldat de 20 ans devient ensuite officier sous la Restauration. Il est naturalisé Français en 1817 par Louis XVIII et fait, à partir de 1833, une belle carrière en Algérie. En 1833 il est commandant et responsable de la casbah d'Alger ; en 1840 il est colonel et commandant de la place d'Alger. Il prend sa retraite en 1847, mais reste en Algérie. En 1853 il est nommé maire à Douéra.
Son nom ne fut donné au nouveau village, créé en 1848, qu'en février 1851.

Origine du centre : française. Marengo (d'abord appelé Meurad durant 3 ans) est l'une des 42 colonies agricoles de 1848 (dont 3 dans la Mitidja : Bou Roumi, El Affroun et le futur Marengo). Le décret concernant Marengo a été signé le 17 septembre 1848.
On se souvient que ces colonies ont été d'abord peuplées par des ouvriers parisiens sans emploi après les émeutes de juin 1845 ; et volontaires pour tenter l'aventure. Les premiers ouvriers-colons n'arrivèrent, en plein hiver, que le 19 décembre 1848 par le XIIè convoi. D'autres vinrent en 1849 ; soit au total plus de 800 personnes car ils venaient en famille avec femmes en enfants. A Paris ils se croyaient socialistes. A Marengo ils ne supportèrent ni le travail en commun (sous direction militaire) ni la gestion commune des ressources : pas solidaires pour un sou.

Le territoire communal est à l'extrémité occidentale de la Mitidja, dans l'angle où se rapprochent le Sahel, le massif du Chenoua et le massif du Zaccar. Il est parcouru par de nombreux oueds dont la réunion donne naissance à l'oued Nador qui sépare le Sahel de Tipasa et le massif du Chenoua. Avant les travaux d'assèchement du lac Halloula, le nord de la commune était souvent inondé. C'est dans cette zone qu'avant 1842 se trouvait le repaire des tribus Hadjoutes qui ont massacré colons et patrouilles militaires jusqu'à Boufarik. Il y avait alors une vaste forêt, dite de Sidi Slimane, parfois inondée et difficile à pénétrer.

L'essentiel de la commune est dans la plaine, en pente douce vers le nord ; 150m au sud, 50m au nord.
Elle est traversée par la grande route de Blida à Cherchell par Desaix.
Elle fut traversée, jusqu'en 1925 par la voie ferrée d'El Affroun à Cherchell. Ensuite Marengo devint le terminus d'une ligne El Affroun-Marengo réservée au trafic de marchandises. La fermeture définitive intervint avant 1962.

Les activités sont essentiellement agricoles dans les campagnes ; à l'exception d'une briqueterie située sur la route de Zurich. C'est la vigne et le tabac qui dominent depuis les années 1880. Auparavant on avait tenté en vain la sériciculture et le coton. Mais après 1920 ont été également aménagées des orangeraies.

Marengo est le seul centre. Il aurait dû s'appeler Malglaive plutôt que Marengo car c'est bien le capitaine Malglaive (ou de Malglaive ?) qui fut le vrai responsable de sa naissance et de ses premières années d'existence, en tant que chef , et des militaires sous ses ordres, et des premiers colons dont il contrôlait les travaux. Son nom figure tout de même sur la carte : c'est celui de sa ferme (car il fut aussi colon) située sur la route de Marengo à Meurad.

C'est à Maglaive qu'il revint de situer le futur village sous l'autorité du Directeur de la colonisation. Ce dernier avait donné l'ordre de l'implanter sur la rive droite de l'oued Meurad. Malglaive décida sans autorisation un emplacement plus éloigné des crues en hiver et des moustiques en été. Il aurait été officiellement blâmé pour ce manquement à la discipline, et officieusement félicité pour son bon sens. C'est lui aussi qui, pour accélérer le début des travaux du barrage de Meurad, en 1854, avait avancé l'argent nécessaire (il fut remboursé l'année suivante).

C'est enfin Malglaive, ou l'un de ses subordonnés, qui dessina le plan du futur village qu'il signa en décembre 1849. J'ai trouvé ce plan dans l'ouvrage de X. Yacono, Histoire de l'Algérie, page 118. Je vous l'offre car il est très instructif ; et pas seulement pour Marengo. Il va nous permettre de mener une révision des modalités de création des villages de colonisation à cette époque où les menaces n'avaient pas disparu. Certes les Hadjoutes avaient été soumis depuis 8 ans ; mais pas les tribus des Beni Menasser du Zaccar tout proche.

Ce plan (malheureusement orienté avec le nord " en bas " et l'est " à gauche ") nous rappelle

   ·      

La nécessité d'une protection double : enceinte (en terre ou planches) et fossé. Ainsi que des tours d'angle.

   ·       La présence de portes fortifiées fermées la nuit et gardées.
    ·     
Un plan en damier rigoureux, avec place centrale, où se côtoient l'église, la mairie la gendarmerie, le presbytère et l'école.

       Chaque lot a un jardin, une maison et un appentis .
   
         

Dimensions : 600 x 400m, soit 24ha environ

   
         Place 50 x 80m
   
      
Quatre portes. Marengo est le centre d'un carrefour vers
   Miliana au sud
   Cherchell par Zurich à l'ouest
   Tipasa au nord
   Blida à l'est
   
     Il semble y avoir environ 160 lots urbains pour 160 familles, de quoi loger 600 à 800 personnes
   
     Chaque lot couvre 15 ares.

NB: J'ignore si ce plan fut respecté à la lettre. En 1954 Marengo avait dépassé ses limites.

En 1958 le village était desservi par une seule société d'autobus, celle des Transports Mory. Cet autocar venait d'Alger par Tipasa et Desaix.

Ce village était alors devenu une ville pourvue de la plupart des services ; ce qui en faisait une sorte de petite capitale régionale ; à savoir : 5 banques , un collège, un hôpital, un tribunal.

Population en 1954 : 10 804 dont 2 361 non musulmans, (soit 21,85%, c'est beaucoup).
Population agglomérée en 1948 : 6 991.

Grain de sel de B.Venis : sur ce site, quelques documents sur Marengo: clic