Alger, quartier de la Marine et alentours
UN COIN DU VIEIL ALGER N'EST PLUS AUJOURD'HUI QU'UN VASTE CHANTIER
LA " MARINE " FUT UN ÉLÉGANT quartier résidentiel…
TOMBÉ AUX MAINS DES URBANISTES

avant de devenir le royaume des " salaouetches "

UN COIN DU VIEIL ALGER N'EST PLUS AUJOURD'HUI QU'UN VASTE CHANTIER
LA " MARINE " FUT UN ÉLÉGANT quartier résidentiel…
TOMBÉ AUX MAINS DES URBANISTES
avant de devenir le royaume des " salaouetches "

C'est aujourd'hui un chantier en construction. Une cité nouvelle va naître sur les ruines d'une cité morte, d'une cite détruite.
Larges avenues, immeubles imposants, spacieuses esplanades s'élèvent déjà à la place des ruelles humides et des maisons délabrées. Urbanistes et bâtisseurs ont pris possession de l'endroit. La vieille " Marine " est morte ; mortes aussi ses masures " insalubres et incommodes ". Demain se dressera ici un quartier moderne et confortable. Acceptons-en l'augure !

Dans cet immense chantier, un îlot du passé subsiste. Encore, mais pas pour longtemps, épargné. Rue de la Marine, rue des Consuls… Portes abîmées, murs détériorés, balcons pavoisés de lessives, église abandonnée, école désaffectée. Tous ces lieux où le temps et la misère ont si profondément, imprimé leurs stigmates. Comme une meurtrissure. Comme une plaie mortelle. Tristesse, mais aussi nostalgie !


(suite sous l'article)


Echo d'Alger du 10-9-1952 - Transmis par Francis Rambert

sur site : nov.2023

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Rue des Consuls
Rue des Consuls


UN COIN DU VIEIL ALGER N'EST PLUS AUJOURD'HUI QU'UN VASTE CHANTIER
LA " MARINE " FUT UN ÉLÉGANT quartier résidentiel…
TOMBÉ AUX MAINS DES URBANISTES
avant de devenir le royaume des " salaouetches "

C'est aujourd'hui un chantier en construction. Une cité nouvelle va naître sur les ruines d'une cité morte, d'une cite détruite.
Larges avenues, immeubles imposants, spacieuses esplanades s'élèvent déjà à la place des ruelles humides et des maisons délabrées. Urbanistes et bâtisseurs ont pris possession de l'endroit. La vieille " Marine " est morte ; mortes aussi ses masures " insalubres et incommodes ". Demain se dressera ici un quartier moderne et confortable. Acceptons-en l'augure !

Dans cet immense chantier, un îlot du passé subsiste. Encore, mais pas pour longtemps, épargné. Rue de la Marine, rue des Consuls… Portes abîmées, murs détériorés, balcons pavoisés de lessives, église abandonnée, école désaffectée. Tous ces lieux où le temps et la misère ont si profondément, imprimé leurs stigmates. Comme une meurtrissure. Comme une plaie mortelle. Tristesse, mais aussi nostalgie !

Quartier résidentiel et bourgeois

Tristesse et nostalgie. car ces murs, qui suent la misère. abritèrent autrefois richesse et prospérité.
Il fut un temps, en effet... Un temps déjà. lointain - c'était après 1830 - où ce coin d'Alger était le " bel Alger ". Quartier résidentiel, élégant, recherché, quarter " bourgeois " en un mot avec tout ce que cela comporte d'aisance enviable et de dignité cossue. Là se dressait la préfecture, là se tenait le centre des affaires. La " Place du Cheval " était alors le forum d'Alger. Chaque jour se mêlaient ici à la bourgeoisie de la ville, les fonctionnaires, civils et militaires. Et le soir, sur la place, la musique du 1er zouaves venait exécuter les plus entraînantes polkas de son répertoire.

Fresque étourdissante de vie de lumière et de couleur

Avec les ans, la " Marine " prit un visage nouveau et connut une vie nouvelle. Ce quartier bourgeois devint populaire. Et connut la célébrité. Aux fonctionnaires succédèrent les pêcheurs. Monde étonnant dans un cadre étonnant. Cadre étonnant des rues de la Marine : contraste surprenant d'ombre et de lumière. une lumière éclatante. une ombre " inexprimable ", ensemble saisissant et
mystérieux où Fromentin voyait du " Rembrandt transposé ". Monde étonnant des cafés de la Marine.

Ici se rencontraient dix races diverses, ici s'affrontaient dix langages et cent coutumes. Ici se côtoyaient, agités et turbulents, les fils de toutes les Méditerranées.

Univers étrange et pittoresque animé d'un perpétuel remous. Tableau hurlant de vie et de couleur. Monde extraordinaire ou l'on trouvait indifféremment repris de justice et fils des famille, tondeurs de chiens et marchands de poissons, donneurs de sérénade et joueurs de " tchic-tchic ".
Ici vécurent les Marella, les Faraggi, les Roméo, que la plume d'Achard et le crayon de Brouty ont immortalisés. '

Ils vécurent ici, dans ce royaume des " Salaouetches " inondé de soleil et fleurant l'anisette. Gens simpies et ardents qui avaient de l'enthousiasme, du caractère et... de l'astuce à revendre.

Les " Caves Ste-Philomène " où Louis Bertrand jouait les plongeurs

A deux pas de la rue de Bab-el-Oued, tout à cote de la pharmacie de Lara, les " Caves Sainte-Philomène " étaient le rendez-vous des Espagnols fraîchement débarqués. La taille bien prise dans la ceinture rouge, coiffés de feutres noirs et chausses d'espadrilles, ils venaient là, aux nouvelles, à peine descendus de balancelle, en quête d'un emploi ou à la recherche d'un ami. Le cadre de " ces caves " leur était familier. Ils retrouvaient là, une auberge du " pays " avec son beau comptoir en bois sculpté derrière lequel s'alignaient les tonneaux pansus et imposants d'A1icante et de Xérès, de Madère et de Malaga.

Ici venaient aussi les " rouliers du Sud ", convoyeurs de lourds chargements qu'ils conduisaient jusqu'à Biskra... Biskra, presque le bout du monde.

Aux " Caves de Cérès ", Louis Bertrand, alors professeur au Lycée, faisait - incognito - la plonge pour écouter les conversations des rouliers. Le patron seul le connaissait et les clients parlaient, sans gêne ni retenue, devant ce colosse au cou de taureau qui lavait si consciencieusement ses verres. Quelques mois plus tard, Louis Bertrand publiait " Le sang des races "...