| ------C'est le Gouvernement français 
        qui, en 1844, avait demandé aux Trappistes de l'Abbaye de Notre-Dame 
        d'Aiguebelle de fonder le monastère de Staouëli, en Algérie, 
        et d'y enseigner l'agriculture à la population. Cependant, la loi 
        votée en 1901 contre les Congrégations poussa le Père 
        Abbé de l'époque à vendre les 1.000 hectares de Staouëli, 
        avant d'en être expulsé. On lui reprocha d'ailleurs sa précipitation. 
        C'est ainsi que la famille Borgeaud en devint propriétaire pour 
        un prix avantageux...------C'est donc après avoir été 
        obligés de quitter leur admirable fondation de Staouëli en 
        1904 (car les Trappistes ont été parmi les premiers défricheurs 
        de la plaine de la Mitidja), 
        que les moines (qui pérégrineront en Italie, en France, 
        puis à nouveau en Algérie) ont retrouvé en 1938, 
        sous la direction de Dom Robert Pierre, une propriété stable 
        dans ce séjour de Tib-Harine (les jardins) pour, au fil des ans, 
        transformer cette ferme en une véritable abbaye.
 
 NOTRE-DAME-DE-L'ATLAS ------Au-dessus du porche d'entrée 
        de la basilique de Notre-Dame-d'Afrique 
        à Alger, fournie par la maison Virebent de Toulouse 
        et mise en place à cet endroit en 1868, une belle statue de la 
        Vierge, en grès céramique de 3 mètres de haut protégeait 
        le site.------Une autre statue similaire, vraisemblablement 
        de même origine, avait été placée dans le cimetière 
        du monastère de Staouëli, où de nombreux et jeunes 
        moines étaient enterrés, victimes du paludisme à 
        la suite de la mise en culture des terres marécageuses. Quand les 
        Trappistes quittèrent Staouëli, ils ne purent emporter la 
        statue, sinon dans leurs pensées. II faut croire que ces pensées 
        étaient tenaces, puisque trente-cinq ans plus tard (un an après 
        que les moines se furent installés à Tib-Harine), le 17 
        juillet 1939, "Frères Célestin et Eugène, lit-on 
        dans le Diaire de Notre-Dame-de-l'Atlas, vont à Staouëli chercher 
        la grande statue qui doit être érigée sur la montagne". 
        Le 17 août 1939, " on commence à édifier le socle 
        qui doit supporter la Sainte-Vierge sur le rocher d'Abd-el-Kader" 
        et le 8 septembre 1939, en la fête de la nativité de Myriam, 
        après l'office de none, sans grande cérémonie à 
        cause de la guerre contre les Allemands, mais tout de même en procession, 
        au milieu des chants de Maris Stella, du Magnificat... on procède 
        à la bénédiction sur un toit de l'Atlas.
 ------Couronnée d'étoiles, 
        le pied posé sur le Croissant de lune, discrètement enceinte 
        (oui, enceinte, ce qui est rare) mais non pas crispée dans les 
        douleurs de l'enfantement, comme si elle désirait atténuer 
        les terreurs de l'Apocalypse qui menace désormais le monde, Notre-Dame-de-l'Atlas 
        mûrit l'heure de son fils. Elle semble attendre l'heure de pouvoir 
        donner son fils au monde.
 ------Cela se fera-t-il dans la joie ou dans 
        la douleur ? Dans la paix ou dans la guerre ? Je crains que ce ne soit 
        dans un climat mondial d'Apocalypse, dont la fin de l'Algérie française 
        ne fut qu'une préfiguration
 MON PÈLERINAGE DE JANVIER 
        1962 ------Soudain, je La vis, devant moi, tout 
        entière, d'un seul coup, comme descendue du ciel ou jaillie de 
        la montagne. Ah ! les moines avaient bien calculé leur effet ou 
        bien la Providence l'avait calculé pour eux ! Si Elle n'avait été 
        posée sur un socle, l'on eût cru une apparition !------L'âge ? Seize ans environ. C'est 
        moi qui le dis. C'est ce qu'il m'a semblé.
 ------Douce, sereine, les bras maternels 
        ouverts pour nos coeurs, les yeux abaissés vers la terre, vers 
        nous, vers la Trappe, vers...
 ------Dom Robert, qui était avec moi, 
        me dit : "Vous voyez, me dit-il, tout en bas, le monastère. 
        Mais aussi, là, à mi-chemin, à flanc de montagne, 
        des toits de gourbis ou de maisonnettes, parmi les arbres. Considérez 
        que si vous traciez deux lignes au cordeau, partant des bras de la SainteVierge, 
        vous obtiendriez, un angle, un faisceau, embrassant la campagne. Or, vous 
        remarquerez que pas une de ces maisons ne déborde, ni à 
        droite, ni à gauche, de cet angle. Autrement dit, les musulmans 
        qui sont là se sont mis sous la protection de Myriam, dans ses 
        bras. Ils disent que ceux qui habitent dans le prolongement des bras de 
        " Lalla Myriam", " Lalla" marquant un respect infini, 
        eh bien ! que ceux-là ont sa baraka.
 ------Faut-il ajouter que le rayonnement 
        de Notre-Dame-de-l'Atlas a évité des drames dans les environs 
        où des bandes rebelles opéraient, comme partout ailleurs 
        où il y avait du relief et de la forêt ? Bien des témoignages 
        peuvent prouver l'étendue de cette protection.
 
 SIGNES DU CIEL ------En faisant le tour de la statue, je 
        m'aperçus qu'elle portait une sorte de cicatrice dans le dos.------"Oui, m'expliqua Dom Robert, la 
        foudre l'a frappée et nous avons effectué au mieux la réparation 
        nécessaire".
 ------En descendant vers le monastère, 
        je ne pouvais m'empêcher de penser que ce coup de foudre était 
        terriblement symbolique.
 ------En 1973, des fanatiques, étrangers 
        à ce secteur, s'étaient acharnés sur sa couronne 
        et lui avaient mutilé en partie les bras, ce qui, après 
        le coup de foudre dans le dos, est un symbole de plus de la rage de Satan 
        contre la puissance de Marie et contre ses bienfaits...
 ------Dernier drame, l'assassinat des 7 moines 
        fin mai.
 |  | ------L'annonce par le GIA de l'assassinat 
        des sept moines trappistes, près de deux mois après leur 
        enlèvement, porte à 18, dont 14 Français, le nombre 
        de religieux chrétiens tués en Algérie depuis mai 
        1994.------Parmi ces derniers martyrs, nous nous 
        souviendrons de Dom Christian de Chergé, un enfant d'Alger, prieur 
        de la communauté, 59 ans.
 ------"Un type limpide au regard clair" 
        disait de lui un proche. 11 passe son enfance à Alger, puis fait 
        ses classes au séminaire des Carmes, à Paris. Retour en 
        Algérie pour deux ans de service militaire mais l'indépendance 
        de l'Algérie le fera prêtre à la basilique du Sacré-Coeur 
        de Montmartre puis à Rome.Il passe un temps par l'Abbaye d'Aiguebelle 
        (Drôme) et décide, en 1971, de partir pour l'Algérie. 
        Quelques semaines avant l'enlèvement, il réaffirme à 
        un ami de passage que sa place était dans son pays. Il avait organisé 
        au monastère un vote à bulletins secrets : les Trappistes 
        avaient choisi de rester.
 Extraits du livre de Claude Mouton 
        "Notre-Dame-de-l'Atlas" aux Publications M.C. ------L'Eglise en Algérie------Contrairement aux églises chrétiennes 
        d'autres pays musulmans, Liban, Syrie ou Egypte, l'Eglise n'est pas d'Algérie, 
        mais en Algérie, en état de survie précaire, sans 
        droits, seulement tolérée, ayant perdu son patrimoine et 
        presque tous ses lieux de culte devenus mosquées ou détruits. 
        La religion islamique, si bien accueillie en France, ignore le principe 
        de réciprocité.
 ------Actuellement , trois grands sanctuaires 
        demeurent réservés au culte catholique. A Alger, la moderne 
        cathédrale du Sacré-Coeur, vers le haut de la rue 
        Michelet, où officie un prêtre berbère, 
        et la Basilique Notre-Dame-d'Afrique, confiée à la garde 
        des Pères Blancs. A Bône, la Basilique Saint-Augustin, dont 
        on célèbrera la fête dans deux jours, entretenue par 
        trois Pères Augustins maltais.
 ------Au diocèse d'Alger, Mgr Henri 
        Teissier, 66 ans, a succédé au Cardinal Duval, 93 ans, mal-aimé 
        des Algérois, et aujourd'hui décédé.
 ------Au diocèse d'Oran, Mgr Pierre 
        Claverie, 47 ans, évêque Pieds-Noirs et proche d'eux en métropole, 
        a succédé à Mgr Teissier voici 14 ans. II a négocié 
        la transformation de la cathédrale en bibliothèque.
 ------Au diocèse de Constantine, où 
        officiait Mgr Jean Scotto jusqu'en 1983, décédé en 
        1993, connu pour sa sympathie pro-arabe, puis Mgr Gabriel Piroird, la 
        cathédrale est devenue mosquée.
 ------Au diocèse de Laghouat, Mgr 
        Michel Gagnon est â la tête d'une douzaine de Pères 
        Blancs répartis dans de nombreuses oasis, avec quelques petits 
        frères et petites soeurs de Jésus. Quelques autres Pères 
        Blancs sont répartis dans le diocèse d'Alger.
 ------La vie de l'Eglise est ordonnée 
        en fonction de l'Islam, le dimanche devenu jour ordinaire. Tout signe 
        extérieur d'identité est exclu et Mgr Gaston Jacquier a 
        payé de sa vie le port de sa croix pectorale.
 ------Seuls deux monastères avaient 
        survécu à la montée de l'intégrisme et du 
        FIS.
 ------Celui des Clarisses, à 
        Saint-Eugène qui, en proie à des difficultés 
        financières et ayant perdu leur aumônier, l'un des quatre 
        Pères Blancs assassinés à Tizi-Ouzou, sont parties 
        fin février 1996, regrettées, accompagnées par l'armée, 
        une trentaine au total, relogées à Nimes.
 ------Celui de Notre-Dame-de-l'Atlas, à 
        Tib-Harine, près de Médéa, où les moines cisterciens, 
        pieux et mystiques, exploitaient 374 ha avant l'indépendance : 
        7 d'entre eux sur 9 ont été enlevés le 26 mars 1996 
        et seront assassinés deux mois après.
 ------Ces prêtres en Algérie, 
        une centaine aujourd'hui, tous volontaires, demeurés par vocation, 
        matériellement démunis, souvent efficaces, représentent 
        la chrétienté dans notre terre perdue et si critiquable 
        qu'ait été le comportement de certains d'entre eux pendant 
        la guerre d'Algérie, nous ne pouvons porter de jugement. S'il y 
        avait encore une vraie charité, l'Eglise mènerait grand 
        deuil, plus solennel, réitéré, à l'exemple 
        de Jacob pleurant sur la tunique de son fils Joseph et les médias 
        s'appesantiraient sur ce meurtre comme ils surent le faire en un autre 
        temps pour des captifs au Liban.
 Dr G. Pélissier ------Il aurait été préférable 
        de manifester sur le "Parvis des Droits de l'Homme" à 
        Paris, pendant ces deux mois de captivité, chaque jour durant, 
        afin de leur sauver la vie plutôt que de déposer ces pauvres 
        marguerites, une fois le meurtre consommé. Jean-Marc Lopez
 
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