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le tombeau de la chrétienne

extrait de " aux échos d'Alger, juillet 1986, n°15 "
( je n'ai pas les n° antérieurs )

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Le tombeau de la Chrétienne (Suite et fin du n°14)
-----Quand ce mausolée a-t-il été construit ?
-----Cette sépulture royale est antérieure à la réduction de la Maurétanie en province romaine, c'est-à-dire à l'année 40 après J.-C. C'est vers le même temps qu'écrivait Pomponius Méla. Toutefois dans sa description du littoral africain, cet auteur a reproduit avec fort peu d'addition un ouvrage plus ancien qu'il y a quelques raisons d'attribuer à Varron mort en 27 avant notre ère.
-----D'autre part, le Tombeau de la Chrétienne est postérieur au Médracen (autre monument antique de l'Algérie qui s'élève non loin de Batna au milieu d'un vieux cimetière) puisqu'il en est certainement une copie. Mais il faudrait savoir de quand date le Médracen. Tout ce que l'on peut dire, c'est que la forme de ses chapiteaux doriques l'apparente au mausolée de khroub construit vers 1.50 avant notre ère. D'où l'on conclura, sans vouloir trop préciser, que le Tombeau de la Chrétienne est tout au plus du second siècle.
-----Que cette ruine grandiose soit celle d'un tombeau, cela n'est pas douteux. Il faut évidemment l'identifier avec le monumentum commune regiae gentis (le tombeau commun de la famille royale) qu'un géographe latin Pomponius Méla mentionne sur la côte Méditerranéenne entre Caesarea (Cherchell) et Icosium (Alger). Le Tombeau de la Chrétienne est un tumulus funéraire, semblable à des sépultures indigènes, d'ailleurs bien plus petites, qu'on rencontre par milliers dans toute la Berbérie et dans le Sahara.
-----Le tombeau de la Chrétienne est, au point de vue artistique, une oeuvre assez médiocre, mais ce mausolée est intéressant par les contradictions qu'il représente. Elevé, comme' dans les sépultures primitives des Africains, dans une solitude sauvage, il se montre cependant de très loin, comme un de ces sanctuaires que tant de religions ont dressés et dressent encore sur les hauts lieux. Construction de type indigène, il est couvert d'une chemise grecque.
-----A l'intérieur il est pourvu de voûtes appareillées, d'origine étrangère, de dalles-portes qui ressemblent aux herses en granit des pyramides d'Egypte et en dérivent peut-être par des intermédiaires inconnus. Tas de pierres destiné à emprisonner des êtres redoutables, il s'orne de portes purement décoratives il est vrai, mais rappelant celles par lesquelles les demeures des défunts s'ouvrent chez les Romains et chez les Grecs.
-----Le caveau central, qui n'est qu'un agrandissement de la caisse de pierre dans laquelle le mort était enfoui, est précédé de vestibules et d'une longue galerie, donnant accès à ceux qui viennent visiter ses hôtes et leur rendre hommage. La pratique nationale de l'inhumation a probablement été remplacée par l'incinération. Le tombeau de la Chrétienne est le symbole d'un peuple barbare qui, sans renoncer tout à fait à ses vieilles coutumes, ne repousse par les leçons d'une civilisation supérieure.