La sereine mystique du Maghreb :
TLEMCEN

Selon Guide vert Michelin, 1956


sur site le 7-2-2012

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TLEMCEN
** - Carte Michelin - pli 12.

Tlemcen ( Pour plus de détails, lire " Tlemcen " par G. Marçais (Coll. Les Villes d'Art Célèbres - Ed. H. Laurens - Paris)) offre au touriste les deux aspects caractéristiques de l'Algérie d'une part le calme religieux des mosquées et les ombrages reposants de petites places pittoresques, d'autre part l'activité bruyante des moteurs dans les fabriques et dans les champs.

Au pied des falaises qui la dominent presque à pic vers le Sud, Tlemcen s'élève dans sa délicieuse campagne, où s'étendent de vastes olivettes, des vergers, des boqueteaux de figuiers, de caroubiers et de térébinthes. Son climat d'altitude y rend le séjour reposant et ses trésors d'art hispano-mauresque uniques en Algérie intéresseront le touriste amateur d'art.

L'industrie des tapis créée là de toutes pièces par le Gouvernement Général de l'Algérie permet de donner un travail rémunérateur à la population et connaît un essor considérable. Elle se double par de nombreuses fabriques de couvertures de laines aux bandes colorées.

UN PEU D'HISTOIRE

Une tragique destinée. - Un vieux dicton tlemcenien veut que la ville ait sept murailles, sept enceintes et que ses habitants ne dorment ni le jour, ni la nuit. Le rayonnement de Tlemcen, sa position au coeur du Mogreb, son importance économique et la douceur de sa campagne ont, en effet, toujours attiré sur elle les menaces de ses ennemis.

Dès l'antiquité, les romains établissaient une cité florissante, célèbre pour la qualité de ses fruits, sur le plateau du Mefrouch qui s'étend au pied de la falaise de Lalla- Setti. Au 8e s., Idris 1er, venant d'Arabie, fondait sur les ruines de la cité romaine la première ville musulmane d'Agadir et y élevait une mosquée. Du 10e au 13e s. la ville fut cinq fois détruite et cinq fois reconstruite.

Le Siège de Mansourah. - C'est l'épisode le plus fameux de l'histoire de Tlemcen. Et l'importance des ruines des remparts et de la mosquée qui en subsistent dit assez ce que dut être la bataille entre les deux villes. En 1299, le sultan mérinide de Fès, Abou-Yakoub, entreprit d'élever autour de Tlemcen une enceinte isolant du reste du monde la cité investie. Rarement siège fut si complet, à telle enseigne, dit le chroniqueur, qu'un être invisible aurait eu de la peine à entrer dans la ville où la famine ne tarda pas à faire son apparition.

Pendant ce temps, Abou-Yakoub élevait à Mansourah une vraie ville, ceinte de remparts; il s'y faisait construire un palais somptueux, y édifiait une riche mosquée et de nombreux caravansérails. Les caravanes venaient vers la nouvelle ville au nom glorieux de Mansourah, la victorieuse. " Les troupes d'Abou-Yakoub annexaient le pays au royaume de leur maître. Les ambassades des Etats voisins délaissaient Tlemcen pour la nouvelle capitale. Pendant huit ans, cet état de choses ne fit qu'empirer. Vint enfin le jour de printemps 1307 où le Tout-Puissant exauça les prières des
protecteurs de la cité. A Fès, le Sultan venait de mourir et son petit-fils, pressé de prendre sa succession abandonna le siège de Tlemcen, dont 120.000 habitants avaient péri.

Sept ans plus tard, les Mérinides subissaient un nouvel échec devant Tlemcen. Mais en 1337, à la fin d'un nouveau siège de 4 ans, ils enlevaient la ville dans laquelle ils se plurent à édifier les monuments qui font aujourd'hui sa gloire.

PRINCIPALES CURIOSITÉS (visite durée 2 h. environ)

Grande Mosquée**. - Se déchausser - Offrande au gardien. Cette mosquée fut élevée au 12e s. par les rois de Tlemcen à l'emplacement d'un édifice plus ancien dont subsistent d'intéressants témoignages. Elle se signale extérieurement par son très beau minaret carré de briques ocre rouge qui fut élevé au 13e s. et décoré de stuc ciselé et de faïences polychromes.

De la place de la mairie, on pénètre directement dans la vaste salle de prières dont les 13 nefs de 6 travées sont supportées par des arcs en fer à cheval, reposant sur de robustes piliers blancs. Au sol sont étendus des tapis aux tons chatoyants.

Le mihrab* (p. 24) est la partie la plus décorée de l'édifice. Un arc outrepassé, aux fines sculptures retombe sur des colonnettes de marbre et se détache sur le mur où se déploie un triple bandeau de belles inscriptions coufiques. Cette somptueuse décoration de plâtre sculpté frappe par l'élégance et la répartition des courbes scripturales ou végétales qui la composent.

En avant du mihrab, et éclairant la nef s'élève une superbe coupole* sur nervures ajourées et sculptées dont on retrouve le type à Tolède et à Cordoue. Elle est datée de 1136 par une inscription qui court autour de sa base. Au-delà de la salle de prières, s'ouvre la cour aux ablutions (du 13e s.) dans laquelle se voient deux belles fontaines aux mosaïques multicolores.

La mosquée s'ouvre à l'Est par une petite porte qui donne sur une pittoresque ruelle à arcades.

Mosquée de Sidi-l'Halloui*. - Laisser la voiture après le pont sous la voie ferrée et prendre le chemin qui descend vers le village et le sanctuaire. On jouit alors d'une très belle vue sur cette mosquée au gracieux minaret décoré de briques sculptées et aux toits multiples recouverts de tuiles vernissées.
Le minaret carré aux belles proportions, est surmonté de trois boules et d'un croissant.

Cette mosquée, ainsi que le village qui s'étend à ses pieds doit son nom à un mystique, Sidi Abou-Abd-Allah-Ech-Chaoudi. Savant et juriste andalou, c'était un ancien cadi de Séville où il jouissait d'une considération incontestée, lorsque, au début du 13' s., il prit le bâton de pélerin et s'en fut au Mogreb. On le vit bientôt à Tlemcen où il consacra sa vie à soulager les misères avec les petits profits d'un commerce ambulant de pâtisseries et de beignets " halloua ", qui ont fini par lui donner leur nom et en faire une sorte de " papa gâteau ".

La mosquée s'ouvre vers le Nord par une porte sévère dominée par un auvent de bois sculpté. (Se déchausser). La cour intérieure s'orne de très belles mosaïques vertes et de faïences polychromes. Sa salle de prières est couverte d'un plafond de bois, supporté par des arcs reposant sur de minces colonnes.

Sidi-Lahsen. - Ce village pittoresque est situé un peu à l'Ouest de Sidi-l'Halloui. Sa mosquée possède un intéressant minaret du 15e siècle.

Quartier des Nader. - Ce quartier a pour centre la place des Victoires d'où l'on jouit d'une belle vue sur Sidi-Bou-Médine. La rue de Mascara est le souk aux étoffes (Kissaria), la rue IbnKaldoun est celle des brodeurs sur cuir, des tanneurs et des bouchers. La place Bugeaud enfin est le théâtre d'un marché pittoresque.

Musée. - Visite tous les jours de 10 h. à 12 h. et de 15 h. à 17 h. Entrée : 30 F. C'est l'ancienne mosquée de Sidi-Bel-Hassen, petit oratoire privé sans doute réservé aux princes et sultans de Tlemcen et aux grands de la cour. De 50 ans seulement plus jeune que la Ste-Chapelle de Paris, elle date de 1296. Elle se caractérise par ses dimensions modestes et sa grâce exquise. Mais la plus grande partie de sa décoration a disparu car elle a servi de magasin à fourrage et d'école franco-arabe, avant de recevoir une destination plus conforme à sa nature.

Extérieurement, son petit minaret carré décoré de briques ciselées et ses toits de tuiles aux belles proportions forment un tableau pittoresque.

A l'intérieur, l'ancienne salle de prières est recouverte d'un beau plafond de cèdre ouvragé supporté par de minces colonnes d'onyx. Le mihrab* est l'un des plus beaux que nous ait laissé l'art hispano-mauresque. Deux fines colonnettes supportent l'arc ouvragé dont la partie haute est encadrée de bandeaux, sur lesquels courent de magnifiques inscriptions. Au-dessus s'ouvrent trois petites fenêtres dont les plâtres ciselés laissent filtrer une lumière tamisée.

Le musée abrite une belle collection d'inscriptions latines et arabes, de mosaïques, de faïences et de poteries. Au premier étage, on voit des vestiges de préhistoire découverts dans la région et les collections géologiques et historiques réunies par M. Brevet, ancien curé de Tlemcen.

AUTRES CURIOSITÉS

Tombeau du Rabb-AI-Ankaoua. - Il est situé à la sortie de la ville, à droite de la N 22 conduisant à Beni-Saf. Le Rabb-Al-Ankaoua était rabbin de la grande synagogue de Tlemcen, où depuis le 12° s. subsiste une communauté juive importante. Savant et philosophe, Al-Ankaoua avait enseigné la science religieuse à Marrakech et à Honaïne (p. 103) avant de venir à Tlemcen où, depuis le 14e s. son tombeau est très vénéré. Le jardin qui l'entoure est, pendant une semaine entière, le théâtre de prières et de réjouissances. Elles commencent le 34' jour qui suit la Pâque israélite. Ces fêtes auront lieu le 19 mai en 1957, le 8 mai en 1958, le 26 mai en 1959.

Synagogue.
- Elle abrite dans de hautes armoires vitrées, des rouleaux manuscrits des saintes Écritures.

Ancien bassin. - Il longe le rempart qui s'étend à l'Ouest de Tlemcen. Cette vaste piscine, !ongue de 200 m., large de 100 et profonde de 3, fut construite pour distraire la fille d'un roi de Tlemcen. Des miroirs d'eau semblables se retrouvent à Fès et à Marrakech.

Mechouar. - C'est l'ancienne résidence fortifiée des rois et princes de Tlemcen, enfermée dans une muraille d'enceinte. Actuellement, c'est un dépôt de véhicules de l'armée.

Bain des teinturiers. - Il date des 11 e et 12e s. On y reconnaît le plan des thermes romains transformés en hammam par les musulmans. La salle principale est couverte d'une coupole supportée par des colonnes et entourée de galeries.

Jardin de la pépinière. - Agréable jardin fleuri sous l'ombrage de beaux arbres.

ENVIRONS

Mansourah* : ruines ; koubba de Lalla-Setti** : site ; vue - circuit de 15 km en auto - environ 2 h.

Quitter Tlemcen par la sortie n" 2 du plan et suivre la N 7 en direction de Marnia. On laisse oientôt à gauche la N 22 en direction de Sebdou, à hauteur d'une ligne de fortins en ruines. 1 km plus loin dans un paysage d'oliviers au feuillage argenté, on prend à gauche une petite route goudronnée. Laisser la voiture à hauteur du minaret isolé en

Mansourah. - Du camp que es Mérinides de Fès établirent aux portes de Tlemcen en 1299 (voir p. 145) il ne reste que les ruines des remparts et d'un minaret et les remparts* de pisé dont subsistent des pans de mur et es ruines de 80 bastions s'étendaient sur 4 km et enfermaient un vaste espace de 100 hectares. Avec le temps ils ont acquis une très belle patine dorée. De l'ancienne mosquée ne subsistent que des murailles en pisé et la moitié Nord du minaret* (restaurée). Cette grande tour de pierres sculptées est une oeuvre admirable de hardiesse et de pureté de lignes. La décoration de sa porte, constituée de trois arcatures, est unique en Algérie. Au-dessus, s'élèvent .n étage nu, puis un étage de sculptures encadré par de fines arcatures. Ce minaret était incrusté ce faïences dont certaines subsistent et brillent au soleil. A l'intérieur, un chemin en spirales permettait d'atteindre à cheval le sommet du minaret. L'écroulement de la moitié Sud de cet édifice a vivement frappé l'imagination populaire. L'explication la plus simple est rapportée par la légende arabe suivante pressé de voir la tour terminée, le sultan fit appel à deux architectes, l'un musulman qui éleva la partie la plus belle et la plus solide, l'autre par un juif qui n'apporta pas à son œuvre tout le soin nécessaire. En fait l'écroulement est dû au pourrissement des linteaux de bois lui provoqua une crevasse dans le monument.

Reprendre la voiture et poursuivre vers le village moderne de Mansourah, où l'on prendra, à droite, en direction de Sebdou, la N 22 qui offre, au milieu des olivettes, de jolies vues sur la campagne tlemcenienne. 3 km plus loin, prendre à gauche un chemin caillouteux qui s'élève sur les iancs du Djorf-El-Kébir ou grande falaise, en réservant, à gauche, des vues de plus en plus vastes. Dn quitte bientôt le rebord.de la falaise et l'on parcourt un plateau couvert de vignes et d'arbres '-uitiers. Laisser la voiture près d'une maison isolée, à droite, et prendre à gauche un sentier qui, entre les vignes, les champs ou lés terres incultes, se dirige vers la koubba que l'on aperçoit en face le soi.

Koubba de Lalla-Setti**. - 1 h. à pied AR. Cette koubba est élevée en l'honneur de la fille de Sidi Abd-El-Kader-Diilali', patron de Bagdad, d'où son nom de Lalla-Setti; ces deux noms, respec'vement berbère et arabe, signifiant Madame. Elle occupe un site** à 1.025 m. d'altitude sur le -ebord de la falaise abrupte, d'où l'on jouit d'une vue ** exceptionnelle sur Tlemcen et sa campagne toute verdoyante d'arbres fruitiers, piquetée de villages au nombre desquels on reconnaît Mansourah et Sidi-Bou-Médine. Les minarets des mosquées mettent dans ce décor la note religieuse de l'Islam Nord-Africain.

Reprendre la voiture et poursuivre le chemin qui court au pied de la pinède qui garnit le versant Nord du djebel El-Beniane et ramène, par le plateau du Mefrouch, à Tlemcen.

Agadir, Sidi-Yakoub* et Sidi-Bou-Médine** : oratoires musulmans. 7,5 km en auto AR, plus 2 h. de marche ou de visite.

Quitter Tlemcen par la porte Bab-El-Djied et suivre la route d'Agadir. Laisser la voiture un peu après le minaret qui s'élève à gauche de la route.
!Agadir. - Ce village, bâti à l'emplacement d'une ville romaine nommée Romarin, abrita une j-losguée élevée par Idris I dès le 8' s. De cet édifice, seul subsiste de nos jours le minaret dont le socle est fait de pierres portant des inscriptions romaines et dont la partie haute, faite de briques
-auges ciselées, très pittoresque, avec son réseau d'arcades lobées, de mosaïques polychromes et re losanges émaillés, remonte au 13e siècle.

Poursuivre à pied le chemin qui se prolonge au-delà d'Agadir (1 / 4 h. à pied AR). A l'extrémité un tournant à gauche apparaît la Koubba de Sidi Daoudi.

Koubba de Sidi Daoudi. - Cette koubba couverte d'une coupole à 12 pans abrite le tombeau de Idi Daoudi, le premier patron musulman de Tlemcen. C'est un gracieux petit édifice blanc, enfoui crans le feuillage clair de vieux oliviers et de figuiers.

Regagner la voiture et faire demi-tour jusqu'à un carrefour où l'on prendra à gauche une route vers le bois sacré de Sidi-Yakoub.

Sidi-Yakoub *. - C'est un lieu de promenade très agréable. Sous l'ombrage de gigantesques té binthes s'élèvent le modeste tombeau de Sidi-Yakoub, la koubba de briques dite tombeau de sultane (12e s.) et la koubba de Sidi Louahb-Ben-Monabbih, autre saint personnage de Tlemcen.

Reprendre la voiture et rejoindre la N 7 qui ramène à Tlemcen. Avant de pénétrer dans la ville on prendra à gauche la route de Sidi-Bou-Médine. On traverse alors l'ancienne Makbara ou champ des morts puis on verra, à un carrefour à droite le cimetière musulman.

Cimetière musulman. - Bordé de hauts cyprès et de haies de cactus. Ses très nombreuses tombes blanches sont envahies par les herbes.

Un peu plus loin, arrivé à une bifurcation, prendre à gauche. On aperçoit à droite la kouba de Sidi Snoussi et un petit minaret isolé au pied duquel s'élève le tombeau de Sidi MohammE Ibn-Ameur où la population musulmane vient prier les soirs de lune rousse et les nuits de comète par crainte d'une guerre.

Bientôt on passe au pied de la koubba, à gauche tombant en ruines, de Sidi Abou-Ishâq-Et-Tair. Illustre marabout qui vivait là au 13e s. et avait dit la légende, le pouvoir de voler comme un oiseau. Ne lui arrivait-il pas d'assister, dans la même journée, aux prières de midi à la Mecque, de 5 h. à Jérusalem, et du soir à Sidi-Bou-Médine. On parvient ainsi au village de Sidi-Bou-Médine.

Sidi-Bou-Médine **
. - Tombeau et mosquée. Description p. 135.

Cascades d'EI-Ourit* : site; grotte des Beni-Ad : concrétions. 34 km en auto AR, plus 1 h.. marche ou de visite. Demander la clef de la grotte au S. I. de Tlemcen et emporter des lampes. Quitter Tlemcen par la sortie n° 1 du plan. La N 7 assez sinueuse se déroule dans un beau payscr d'oliviers et court sur les flancs du djebel Chouka. Elle domine le ravin de l'oued Saf-Saf et glisse au fond du cirque grandiose taillé, dans les falaises rouges du djebel Hanif, par l'oued c s'y précipite en pittoresques cascades.

La route se poursuit jusqu'au village de colonisation d'AM-Fezza. A la sortie de ce village, prend à droite une route goudronnée d'abord bordée de vignes, puis de terres cultivées. Bientôt le gc dron cesse et l'on s'élève sur les flancs du djebel Dokara.

Grotte des Beni-Ad.
- Elle s'ouvre par un porche à l'extrémité de la route d'accès qui se termi par une boucle. Un long couloir en pente débouche dans une première salle souterraine aux bel proportions. Deux autres salles font suite et sont décorées de concrétions.