
Marcel MOUSSY
et la fidélité à la terre algérienne
Il est fier de ses attaches, d’appartenir
à une famille algérienne depuis quatre générations,
autant qu’il demeure fidèle à une terre qui l’a
vu grandir et à ses « impératifs » fixant l’œuvre
chaleureuse d’un romancier qui n’a pas encore franchi le cap
des trente ans.
L’élève du lycée d’Alger, licencié
d’anglais, a vécu en Algérie jusqu’à 20
ans. Il y retourne chaque année à Pâques ou pendant
l’été.
Est-ce un retour aux sources nécessaire ?
- Je ne pense pas qu’un écrivain romanesque puisse rien faire
de valable qui ne prenne racine dans le milieu de son enfance.
N’est-ce pas le cas pour Mauriac, Bernanos, Graham Greene, etc...
?
Mais la réciproque n’est, bien sûr, pas vraie.
Dans « Le sang chaud », sa première œuvre, mieux
qu’à des souvenirs de jeunesse, il paie sa redevance au milieu
qui l’a forte ment imprégné.
- J’aime ce pays d’antagonismes et de contradictions, de civilisations
superposées. L’atmosphère en est grisante, épuisante
et décevante : la beauté du décor, l’animation
des êtres donnent toujours l’impression que quelque chose d’exaltant
va se produire.
Mais rien n’arrive. A Paris non plus, mais au moins on ne s’y
attend pas.
Terre de création, inscrivant aux frontons de ses villages les
noms de batailles napoléoniennes ou des noms arabes poétiques
- les lieux préférés de Marcel Moussy l’Algérie
lui offrait avec « Arcole ou la Terre Promise » un terrain
d’élection pour y suivre la fondation d’une œuvre
humaine.
- Ce qui a inspiré « Arcole », c’est le besoin
de justifier mon acté de naissance. Sans doute aussi, le besoin
obscur de retrouver une tradition, le point de contact de l’Algérie
et de la France particulièrement sensible et déchirant au
moment où mes ancêtres acceptaient l’émigration
et le dépaysement.
A cette Algérie littéraire qui a sa place au soleil et,
elle aussi, son mot à dire, Marcel Moussy accepte de s’intégrer.
- On parle beaucoup depuis un an de la littérature d’Algérie,
mais nous avions toujours considéré Camus et Roblès
comme des nôtres, et eux-mêmes ont toujours insisté
sur leurs attaches. Ce qui est nouveau, c’est l’éclosion
d’œuvres autochtones d’expression française, capables
de prouver avec quelle maîtrise une langue d’emprunt pouvait
être utilisée par nos confrères musulmans. On peut
répondre que Saint-Augustin le Berbère fit déjà
quelque bruit en latin et que T Algérie semblerait le pays des
dissociations entre race et religion aussi bien qu’entre race et
langage.
Aussi est-ce avec sympathie qu’il a pris contact avec Feraoun, Mammeri
et Mohammed Dib, étant déjà en relation avec Audisio,
Roblès, Jean Pellegri. Mais les regards du professeur d’anglais
ne s’attachent pas seulement à son Algérie natale.
Chez les auteurs étrangers, il s’intéresse aussi à
de grands modèles.
- Parmi les romanciers contemporains. deux étrangers m’ont
donné ce désir d’imitation dont parle Malraux dans
sa « Psychologie de l’Art » et qui est à l’origine
de toute création : Faulkner et Graham Greene. Quant à James
Joyce, il est pour moi comme pour beaucoup de jeunes écrivains,
le plus séduisant et le plus inquiétant des auteurs, puisque
son œuvre est à la fois la somme et la destruction de tout
roman possible.
Marcel Moussy songe à son prochain roman, « Les Mauvais Sentiments
». N’y voyons pas l’expression d’un pays de dissonances
et d’amalgames qui lui est cher et qui exige uns psychologie très
sûre de sa voie. Car l'Algérie littéraire, comme tout
ce qui est enté sur une vie coloniale, veut pour sa réussite
que le « neuf » auquel elle aspire soit avant tout du «
vrai ».
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