Alger, les cinémas
LA VIE DU R. P. DE FOUCAULD A L'ÉCRAN
Une journée avec Léon Poirier, réalisateur de " l'Appel du Silence "

La biographie de Charles de Foucauld (1858-1916), surnommé l'ermite du Sahara, missionnaire en Algérie et au Maroc, et assassiné a Tamanrasset par une troupe de rebelles venus de Tripolitaine.


LA VIE DU R. P. DE FOUCAULD A L'ÉCRAN
Une journée avec Léon Poirier, réalisateur de " l'Appel du Silence "

Depuis quelques jours, Léon Poirier, retour du Hoggar, était attendu à Alger où il devait tourner certains épisodes de ce film émouvant qu'il a décidé de consacrer à la vie héroïque du R. P. de Foucauld. Mais nous apprîmes bientôt qu'une tempête de sable l'avait surpris en plein désert et, contraint d'abandonner ses voitures automobiles aux mains expertes des mécaniciens, c'est par la voie ferrée qu'il dût regagner la capitale.

Le teint légèrement bronzé, nullement déprimé, cependant, par ses deux mois de labeur ininterrompu dans des régions admirables de solitude, Léon Poirier nous accueillit par ces seuls mots, qui se passent d'ailleurs de tous vains commentaires : je suis très satisfait.

Et le sympathique metteur en scène de nous donner d'intéressants détails sur la réalisation de son œuvre dont le maréchal Lyautey lui-même disait, peu de temps avant de mourir, qu'elle serait, dans les circonstances actuelles, d'une grande utilité au peuple de France. Voici, brièvement évoqué, le petit ermitage de l'Asekrem perdu dans un paysage chaotique, parmi lés roches calcinées du Hoggar, à 2.700 mètres d'altitude. La réincarnation du Père de Foucauld, grâce à la magie du cinéma. Lés Indigènes n'en croient point leurs yeux. Le marabout! c'est lui, il a ressuscité, qu'Allah soit loué ! Non, prétendent les autres, c'est son frère et tout ce monde, sincèrement transporté d'une joie céleste, se prosterne et s'humilie aux pieds de Jean Yonnel qui vit là des heures inoubliables et merveilleuses. Dans un bordj, des officiers, éblouis par la ressemblance, s'approchent du comédien à pas lents, l'observent un moment sans mot dire et détournent la tête pour pleurer.



NOTA:TEXTE COMPLET SOUS L'IMAGE.

https://fr.wikipedia.org/wiki/L%27Appel_du_silence
ou
https://www.unifrance.org/film/8517/l-appel-du-silence


Afrique du nord illustrée du 11-1-1936 - Transmis par Francis Rambert
sur site : aout 2021

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L'appel du silence
L'appel du silence


Léon Poirier,
Léon Poirier,
réalisateur

Jean Yonnel,Foucault
Jean Yonnel,Foucault

Pierre de Guingand, Laperrine
Pierre de Guingand, Laperrine



Alice Tissot, femme du notaire
Alice Tissot, femme du notaire



LLA VIE DU R. P. DE FOUCAULD A L'ÉCRAN
Une journée avec Léon Poirier, réalisateur de " l'Appel du Silence "

Depuis quelques jours, Léon Poirier, retour du Hoggar, était attendu à Alger où il devait tourner certains épisodes de ce film émouvant qu'il a décidé de consacrer à la vie héroïque du R. P. de Foucauld. Mais nous apprîmes bientôt qu'une tempête de sable l'avait surpris en plein désert et, contraint d'abandonner ses voitures automobiles aux mains expertes des mécaniciens, c'est par la voie ferrée qu'il dût regagner la capitale.

Le teint légèrement bronzé, nullement déprimé, cependant, par ses deux mois de labeur ininterrompu dans des régions admirables de solitude, Léon Poirier nous accueillit par ces seuls mots, qui se passent d'ailleurs de tous vains commentaires : je suis très satisfait.

Et le sympathique metteur eh scène de nous donner d'intéressants détails sur la réalisation de son œuvre dont le maréchal Lyautey lui-même disait, peu de temps avant de mourir, qu'elle serait, dans les circonstances actuelles, d'une grande utilité au peuple de France. Voici, brièvement évoqué, le petit ermitage de l'Asekrem perdu dans un paysage chaotique, parmi lés roches calcinées du Hoggar, à 2.700 mètres d'altitude. La réincarnation du Père de Foucauld, grâce à la magie du cinéma. Lés Indigènes n'en croient point leurs yeux. Le marabout! c'est lui, il a ressuscité, qu'Allah soit loué ! Non, prétendent les autres, c'est son frère et tout ce monde, sincèrement transporté d'une joie céleste, se prosterne et s'humilie aux pieds de Jean Yonnel qui vit là des heures inoubliables et merveilleuses. Dans un bordj, des officiers, éblouis par la ressemblance, s'approchent du comédien à pas lents, l'observent un moment sans mot dire et détournent la tête pour pleurer.

Les souvenirs s'égrènent. Léon Poirier nous les conte gentiment, d'une voix lente qui se resserre quelquefois comme un sanglot. Et puis ce sont des détails pittoresques. Les nuits passées sur la piste à attendre que les vents s'apaisent. L'empressement du cuisinier Targui et son extraordinaire talent pour accommoder en un tour de main le plus appétissant des repas. Tout cela est noté sans doute dans ce carnet de route que notre interlocuteur conserve jalousement dans sa poche. Nous aurions pu faire une plus ample moisson, mais véritablement, il eut été cruel d'abuser d'une complaisance aussi charmante et nous avons préféré rendre au plus tôt sa liberté à Léon Poirier pour le voir à l'œuvre, auprès de ses collaborateurs fidèles, sous l'œil impassible des caméras.

...Dans le haut de la Casba. Une ruelle en pente. Deux jeunes officiers descendent lentement, s'arrêtent, écoutent. Au sommet d'un minaret, un muezzin appelle les croyants à la prière.
- C'est beau...
- C'est l'Islam, messieurs
répond un promeneur solitaire, qui se découvre aussitôt et s'excuse :
_ Permettez-moi de me présenter. Mac Carthy, conservateur à la bibliothèque nationale.
- De Foucauld, lieutenant au 4ème Hussards, déclare le premier officier en portant la main à son képi.
- Laperrine, annonce le deuxième.

La scène est minutieusement répétée, Jean Yonnel, Pierre de Guingand et Boverio (Mac Carthy) y apportent une telle conscience professionnelle qu'elle n'est enregistrée que deux fois. Il est vrai que Mme Jeanne Léon Poirier veille aux moindres détails de la prise de vue. Elle va de la boite à maquillage aux accumulateurs ; corrige un pli du costume de Yonnel, tient tour à tour le rôle de la script-girl et celui de l'assistante. Et tout cela se fait sans le moindre bruit, sans le moindre heurt. On aimerait que le cinéma adopte définitivement ce bel optimisme dans l'action. Comme il y a loin, en effet, de cet accord parfait au désordre habituel des studios ! Ici, les mots gras sont bannis. Il n'est plus utile, pour se faire comprendre, d'employer l'argot des marchands à la halle ni de menacer à tout bout de champ. Il est vrai que L'APPEL DU SILENCE n'est pas un film ordinaire. Chacun y apporte le meilleur de lui-même, parce que chacun a la foi. Cette immense monument, qui viendra comme un temple jeter sur les masses humaines une ombre de paix et de sérénité, s'est construit dans un élan d'enthousiasme mystique et rappellera, par sa conception, les chefs-d'œuvre religieux de l'époque médiévale. ...Nous avons retrouvé le soir, dans un grand hôtel d'Alger, les membres de cette admirable compagnie. Autour de la table à laquelle Léon Poirier nous avait gentiment convié, réalisateur, machinistes, opérateurs, photographes et interprètes s'étaient réunis en une magnifique communion. Il n'est pas jusqu'à la présence du R. P. Joyeux qui n'ait donné à cette assemblée un caractère de symbole particulièrement émouvant.

Yonnel nous parla de la maison de Molière et de ses contrats draconiens qui l'obligèrent, récemment, à soulever un incident assez grave ; De Guingand passa en revue quelques-uns de ces escrocs fameux dont notre pauvre industrie s'obstine à vouloir respecter la présence et notre excellent camarade Mihalesco se plut, avec cette verve qui le caractérise à évoquer les heures passées à Laghouat pendant la réalisation de SIDONIE PANACHE.

Le lendemain matin, la troupe de Léon Poirier prit le train à destination de Mascara et du Maroc. Huit jours suffiront à l'auteur de L'APPEL DU SILENCE pour terminer ses extérieurs africains, mais, avant de reprendre le chemin de Paris où l'attendent les décors du studio, il fera, le 18 janvier à l'Opéra d'Alger, une importante conférence.

Ce sera pour notre grande ville une occasion unique de manifester à l'artiste et au Français toute la reconnaissance que nous inspire son entreprise, la plus belle, la plus noble sans doute, qui ait été jamais tentée par le cinéma.